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équivalent des vêtemens, durable et transportable, tout ce matériel ne laisse pas que de dépendre dans une certaine mesure, — comme le vêtement lui-même, — des conditions géographiques, mais avec quelle indépendance relative, et pour les sociétés civilisées, avec quelle indépendance croissante ! Il échappe précisément en très grande partie à la tyrannie du cadre géographique immédiat, et partant l’homme est plus libre d’y manifester ses tendances propres, spontanées ou traditionnelles, impulsives ou ethniques.

Or cet ensemble d’objets, voilà par excellence le domaine de l’ethnographie : voilà sur quels sujets portent à bon droit les recherches attentives des « ethnologues. » Tous ces faits ne doivent être ni rejetés, ni négligés par les géographes ; mais ils doivent être pour eux des faits d’importance seconde, ils les observent et les classent sans en exagérer la dépendance géographique. Tel ou tel de ces instrumens ou groupes d’instrumens peut, ici ou là, exprimer d’une manière très vive certaines conditions fondamentales du cadre géographique ; mais, encore une fois, plus les sociétés se compliquent et plus elles se mêlent, plus ces objets perdent pour ainsi dire leur acte de naissance géographique, plus ils tendent à devenir uniformes et mondiaux, réglés seulement par les grands courans de l’activité économique.

Ce serait donc une grave erreur que de placer sur un même plan, en géographie humaine, les faits fondamentaux et ces « objets » qui sont au sens littéral du mot (pour les géographes, mais non pas encore un coup pour les ethnographes) des faits « accessoires. »


Les six types de faits, qui se manifestent d’ailleurs sous des formes parfois très complexes, très mélangées et d’une infinie variété, sont donc, — avec leur ample cortège d’« objets, » — les réalités superficielles qu’atteignent nos yeux. Là s’arrête l’observation matérielle : est-ce à dire que là aussi puisse s’arrêter la géographie humaine ? — Redescendons à présent sur la terre, et regardons les sociétés humaines de plus près.

Tous les « signes » matériels que nous avons notés et classés, et qui s’imposent à notre attention première, et qui sont et demeurent les fondemens de la géographie humaine, ne sont pas autre chose que les signes de l’activité même des hommes. C’est dire qu’ils ne peuvent être maintenant analysés et expliqués sans