Résumons-nous : l’ordre moral et l’ordre civil se doivent recouvrir ou compénétrer. La religion a deux faces qui se correspondent : elle est indivisiblement une morale et une politique. La morale est une politique en germe ; la politique est la morale en action. Solidarité-égalité : toute la religion, toute la morale, toute la politique tiennent dans ces deux mots.
« Leroux est assurément un grand producteur de pensées, mais il est dépourvu de méthode : » ce jugement de Heine sur Leroux est le plus vrai peut-être, sinon le plus complet, qu’on ait porté sur notre philosophe. Dépourvu de méthode : cela signifiait pour Heine, que Leroux ne s’est jamais donné la peine de « composer » un livre, ou seulement un article de revue ; mais cela signifiait aussi que Leroux s’est toujours montré impuissant à saisir, dans une vue synthétique, les différens aspects de sa pensée ; et c’est ce qui explique le peu de cohérence de cette pensée, les contradictions où elle se complaît, et les solutions de continuité qu’ici et là on y observe. Absence d’unité : telle est donc, sous un premier point de vue, la caractéristique de l’œuvre de Leroux.
Cette œuvre fait penser, ouvre d’infinis horizons, remue un nombre incalculable de pensées : voilà ce qu’on en peut dire, à la considérer sous un second point de vue. Non pas qu’elle soit une œuvre de tous points originale ; les idées maîtresses n’en sont pas de Leroux ; elle doit beaucoup à Saint-Simon, beaucoup encore à Lamennais, notablement moins à Lessing et à Schelling, quelque chose peut-être à Krause. Mais que Leroux ait eu des maîtres, cela n’enlève à son œuvre qu’une partie de son originalité. Est-il d’ailleurs quelqu’un qui ne doive