Bülow en aurait dit davantage s’il avait repris la parole ; mais on sait qu’après son discours il a éprouvé une syncope subite qui a causé en Allemagne et partout ailleurs une vive émotion. M. de Bülow n’excite personnellement que des sympathies ; tout le monde désire qu’il conserve sans interruption la direction des affaires ; on n’a été rassuré que lorsqu’on a appris que son indisposition n’aurait pas de suites graves. Le ton de son discours avait été parfaitement calme, bienveillant, rasséréné et rassérénant, un peu différent même à ce point de vue de quelques-uns de ceux qu’il avait prononcés au moment eu la crise était à l’état aigu. C’était vraiment un discours de détente, et nous l’avons pris comme tel. La seule observation qu’il a suscitée chez nous est que, si les dispositions de l’Allemagne ont été toujours telles que M. de Bülow les a manifestées à la fin, on aurait pu s’entendre plus vile, avec un effort infiniment moindre, et avec un frottement beaucoup moins dur. Mais tout est bien qui finit bien.
Ce que n’a pas dit le chancelier de l’Empire, d’autres orateurs l’ont dit après lui et nous le retrouvons dans tous les journaux allemands. La Russie et l’Italie ont été et sont toujours l’objet d’accusations pleines d’acrimonie. On leur reproche de n’avoir pas toujours été du côté de, l’Allemagne à Algésiras. L’Italie, dit-on, aurait dû le faire, parce qu’elle est son alliée, et la Russie quoiqu’elle soit la nôtre : on n’a pas l’air d’apercevoir la contradiction qu’il y a dans ces exigences s’appliquant également à des situations aussi différentes. C’est surtout contre la Russie que s’exerce aujourd’hui la mauvaise humeur germanique : évidemment, et sans que nous sachions pourquoi, on avait compté sur elle à Berlin, et on a été mécontent de s’être trompé. Peut-être faut-il attribuer en partie cette déception à certains procédés de la politique allemande, qui ne ménage pas toujours suffisamment même ses amis, et il semble bien que ces procédés se continuent sous une autre forme, s’il est vrai, comme on l’assure, que l’Allemagne fermé son marché à la Russie pour son prochain emprunt. Quant à nous, nous n’avons pas été surpris de l’attitude des diverses puissances à Algésiras. Nous nous y attendions, et nous avions le droit de le faire, ce qui ne diminue d’ailleurs en rien la reconnaissance que nous en éprouvons. L’Allemagne n’ignorait pas que l’Italie, l’Espagne, l’Angleterre avaient des engagemens formels avec nous : comment a-t-elle pu croire qu’aucune d’elles y manquerait au moment de les remplir ? Mais l’a-t-elle vraiment cru ? L’Italie, en particulier, si elle marche volontiers d’accord avec l’Allemagne dans les affaires continentales, marche de préférence avec l’Angleterre et avec nous dans les