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peu vêtue et pieds nus… non pas sale, mais pleine de poudre… naturellement, à force de marcher par ces chemins et sentiers du diable, à travers tant de sierras et de terres incultes… Pays grandiose que le nôtre, mais plein de poudre. »

Cette Espagne non pas officielle, mais réelle, M. Galdós en a d’abord conté l’histoire pour pénétrer jusqu’au fond profond de son âme. Et parce qu’il en aimait la beauté, il n’a pas cru devoir lui cacher ses faiblesses et ses imperfections. Il l’a contrainte alors à venir se regarder dans son théâtre. Elle n’a pas toujours reconnu son image, mais elle s’est toujours sentie envelopper par un souffle étrangement pur et frais. M. Galdós ne pouvait pas lui rendre un meilleur service. Elle se renfermait en elle-même et s’étiolait dans le regret stérile d’une gloire passée. Avec plus de piété filiale que d’ardeur révolutionnaire, il a secoué la poudre qui la couvrait, et il lui a enseigné le salutaire remède de marcher au grand air dans la lumière d’aujourd’hui.


ERNEST MARTINENCHE.