Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 32.djvu/712

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mémoire d’un ouvrier qui fut aussi un gentleman. Personne n’a traité avec plus d’énergique bon sens que cette romancière de l’Ouest et du Nouveau-Sud, la question compliquée de la lutte, partout engagée entre le capital et le travail[1]. Cette fois nous voyons ce que les nihilistes deviennent en Amérique, nous entendons leur opinion sur ce pays qui les avait tentés de loin : « On y est moins libre que chez nous ! » Pourtant quel produit parfait peut sortir, à en croire Octave Thanet, de l’union des deux races slave et anglo-saxonne, si mal assorties qu’elles paraissent au premier aspect ! La tête n’est pas tout, il faut avoir du cœur pour conduire et diriger les hommes ; mais le mépris du détail qui règne en Russie doit être corrigé ; c’est l’esprit pratique de l’Anglo-Saxon qui, à la fin, triomphera. Chez l’Homme de l’heure présente, la pitié contenue par la justice, l’idéal respectueux quand même de la réalité, aura sa large part.

Le roman tout d’actualité qui porte ce nom caractéristique, The man of the Hour, est par excellence une étude comparative, bien vivante, de races et de mœurs telle que l’Amérique seule pouvait la fournir. En outre, le tableau qu’il nous présente des terribles grèves de Chicago en 1895, dont l’auteur fut le témoin et la dénonciatrice, feront de ce livre dans l’avenir un roman historique à sa manière.


TH. BENTZON.

  1. Dans l’Arkansas. Revue des Deux Mondes, du 1er février 1896.