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l’Angleterre, la Russie, la France, les Etats-Unis, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, la Hollande se sont prononcés pour l’étude conjointe des deux questions ; l’Allemagne, le Maroc et l’Autriche contre. La Suède s’est abstenue. Nous ne voulons pas exagérer l’importance de ce vote : on ne saurait dire pourtant qu’il n’en ait pas eu, ni que sa signification ait été dénuée de clarté. Sans doute aucune question n’était posée au fond ; mais il n’était pas indifférent de savoir si la discussion de la Banque et celle de la police seraient ou ne seraient pas liées, car nous ne voulions pas faire sur l’une des concessions qui auraient une apparence définitive, avant de savoir si on nous en ferait sur l’autre. C’est d’ailleurs sur les questions les moins importantes que les préférences déterminées par les sympathies ont le plus libre jeu.

Nous nous demandions quel effet produirait en Allemagne le vote du 3 mars. La presse a manifesté de la mauvaise humeur, d’abord contre l’Italie, puis contre la Russie qui, en séance de comité, a soutenu énergiquement l’organisation de la police au moyen d’officiers et de sous-officiers exclusivement français et espagnols : mais les sentimens de la presse ne pénètrent pas toujours dans ce qu’un ministre français a appelé autrefois « la région des gouvernemens. » Le gouvernement impérial qui se flatte, souvent avec raison, de faire de la politique objective, a montré beaucoup de bon sens et de sang-froid. Il a compris qu’après nous avoir entraînés fort loin dans la voie des concessions, le moment était venu d’y faire lui-même quelques pas. Il le pouvait, assurément, sans compromettre aucun intérêt allemand et le vote de la Conférence semblait bien l’y inviter. A persévérer dans l’intransigeance où il était resté jusqu’alors, il risquait de demander à ses amis un effort trop considérable. Il l’a senti. Aussi a-t-on remarqué bientôt un changement dans le ton de M. de Tattenbach : d’autre-part, M. de Radowitz prenait plus souvent la parole, et il ne l’a jamais fait sans laisser la porte entr’ouverte à la conciliation. Pour la première fois, M. de Radowitz trouvait les propositions de la France tout à fait dignes d’être prises en sérieuse considération. Il n’allait pas jusqu’à les accepter intégralement ; mais enfin le progrès était réel, l’entente devenait possible.

Sur la question de la Banque, on a transigé presque sur tous les points qui avaient été réservés, par exemple sur les conditions dans lesquelles nous abandonnerions le droit de préférence qui, lors du dernier emprunt, avait été reconnu à nos banquiers pour les emprunts futurs. Nous demandions que, dans la constitution du capital