Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 32.djvu/477

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle-même a peu travaillé : la besogne principale a été faite dans le cabinet de M. le ministre des Cultes. L’avant-projet qui est sorti de cette officine ne verra probablement jamais le jour, et c’est dommage « pour la beauté du fait ! » comme dit Alceste.

La loi y était rendue plus rigoureuse dans plusieurs de ses dispositions principales. L’avant-projet disait ce qu’elle avait omis de dire ; il interdisait, par exemple, la fusion de plusieurs associations cultuelles en une seule, et les obligeait à ne pas sortir du cadre des anciennes circonscriptions paroissiales : c’était rendre impossible leur formation et leur fonctionnement dans les paroisses les plus petites et les plus pauvres. On voit la conséquence : dans ces paroisses, l’impossibilité de créer des associations cultuelles aurait empêché la dévolution à celles-ci des biens de la fabrique ; l’État s’en serait emparé ; l’accusation qu’on lui adressait à propos des inventaires de viser à la confiscation des biens se serait trouvée justifiée. Il est vrai que l’autorisation de fusionner aurait pu être accordée aux associations, mais il aurait fallu un acte administratif, c’est-à-dire arbitraire : les autorisations auraient été accordées ou refusées suivant la fantaisie du jour. Le Conseil d’État a supprimé tous ces obstacles. Il permet aux établissemens actuels existant dans des paroisses « limitrophes » de transférer leurs biens à une seule et même association. Il admet même que les biens des établissemens supprimés puissent être attribués, non seulement à des associations, mais à des unions d’associations légalement constituées. Pour ce qui est des associations elles-mêmes, la loi les soumet à des restrictions qui sont déjà très étroites. L’avant-projet de règlement allait beaucoup plus loin. Il décidait ce que contiendraient et ce que ne contiendraient pas leurs statuts, qui aurait ou qui n’aurait pas le droit d’y entrer, quelle y serait la proportion des laïques et des ecclésiastiques, quelle partie des recettes pourrait ou ne pourrait pas être versée à d’autres associations ou à des unions d’associations. Le Conseil d’État a fait justice de ces énormités. « Les associations cultuelles, a-t-il dit, se constituent, s’organisent et fonctionnent librement sous les seules restrictions résultant de la loi du 9 décembre 1905. » C’est tout, et cela suffit. L’avant-projet obligeait les associations à remettre à l’autorité publique la liste de tous leurs membres, quel qu’en fût le nombre : le règlement les oblige seulement à donner les noms de 7, de 15 ou de 25 membres de manière à prouver qu’elles comprennent le minimum fixé par la loi suivant la population des communes. Enfin le règlement, tout en disant que les recettes seront exclusivement affectées aux besoins du culte, écarte toute