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« en titre d’office, espérant que ce titre d’honneur qu’ils auront d’être nos officiers en rendra le choix meilleur qu’il n’est à présent. » Ils étaient déjà près de 200 dans la capitale et, quelques années plus tard, il en fut encore créé 400 nouveaux. Six cents avoués dans le Paris du XVIIe siècle, qui ne comptait pas plus de 400 000 âmes !

Malgré son désir de multiplier les offices pour en tirer profit, le gouvernement n’aurait pu charger plusieurs receveurs et payeurs de remplir, dans le même bureau et pour les mêmes sommes, le même emploi. On régla que les comptables n’exerceraient plus leurs fonctions que tous les deux ans, et l’on en créa de nouveaux qui alternèrent avec les anciens. Au bout de quelques années, l’expédient ayant réussi, on adjoignit aux deux premiers receveurs un troisième collègue qui n’opérait que tous les trois ans, et auquel l’usage donna le nom de triennal. A la longue on finit par trouver cet état de choses si naturel, que tout nouvel office de finance fut créé avec trois titulaires à la fois, l’ancien, l’alternalif et le triennal, payés tous les ans, mais ne travaillant qu’une année sur trois. Le calcul était fort simple. : trois offices se vendaient plus cher qu’un seul. Libre à qui en avait les moyens, comme notre receveur de Saintes, d’acheter les trois et d’être à lui seul : triennal, alternatif et ancien.

On imagina des fonctionnaires qui font sourire : des conseillers honoraires dans chaque bailliage, présidial, etc., « parce qu’il nous importe grandement d’admettre en nos tribunaux des personnes de bon sens, quoique non lettrées, ni graduées. » Le bon sens était donc la seule qualité requise pour exercer ces magistratures. Les femmes mêmes sont autorisées à en jouir. Plus d’une fois on lit dans le préambule d’un édit : « Nos chers et bien amés sujets (de telle ou telle province) nous ayant fait remontrer qu’ils désiraient ardemment…, » et l’on terminait par quelques créations d’offices. Aussitôt éclatait un concert de réclamations. Des oppositions étaient formées au Conseil d’Etat par les « chers et bien amés sujets, » qui insistaient avec énergie pour qu’on abandonnât le projet. On institue par exemple trois présidiaux en Provence « pour être agréables aux populations et déférer à leurs vœux. » Les États du pays, le Parlement, les corps de ville, s’unissent immédiatement pour demander la suppression de ces tribunaux, qui a lieu l’année suivante, mais moyennant finances ; le gouvernement vendait sans