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puissances en Afghanistan, et puisque la Russie et la Perse se sont engagées à s’abstenir de toute intervention politique dans les affaires de ce pays, il est manifeste que l’émir ne peut avoir de relations politiques avec une nation autre que l’Angleterre ; et si une puissance quelconque essayait d’intervenir en Afghanistan et dirigeait une agression non provoquée contre l’émir, le gouvernement anglais devrait, le cas échéant, repousser cette agression à la condition que l’émir se conforme, dans ses relations extérieures, aux avis du gouvernement anglais. »

Telles sont les obligations réciproques qui furent contractées alors par le gouvernement anglo-indien et l’État afghan. Elles furent scrupuleusement observées par Abdurrhaman tout le cours de son règne. D’autre part, le gouvernement anglo-indien ne lui ménagea pas son appui. Il l’aida tout d’abord à triompher de son rival, Eyoub-khan, le frère d’Yakoub, qui lui disputait le pouvoir. Maître d’Hérat, Eyoub, après avoir battu le général Burrow, près du fleuve Helmend, était venu assiéger Candahar et avait attaché à sa cause la moitié de l’Afghanistan. Le général Roberts se porta sur Candahar, débloqua la place le 21 juillet 1880, y fit reconnaître l’autorité d’Abdurrhaman et ne rentra dans l’Inde qu’après avoir rétabli l’ordre dans le pays. Dans une circonstance fort critique se rapportant à un incident de frontière, le gouvernement britannique prêta encore ses bons offices à l’émir. Poursuivant ses conquêtes dans l’Asie centrale, la Russie avait, après la prise de Khiva, étendu son pouvoir sur les Turcomans des steppes, puis sur la région comprise entre la mer Caspienne, l’Amou-Daria et l’Atrek, et occupé enfin Merv au commencement de janvier 1884. Elle prétendait en outre à la possession de tout le pays situé au Sud-Est de cette oasis jusqu’à Zulficar sur l’Hériroud et Bala-Mourghab sur le Mourghab, et l’émir, qu’appuyait la diplomatie anglaise, faisait valoir ses droits sur la région, quand le général Komaroff, brusquant la situation, pénétra sur le territoire en litige, battit les Afghans et s’empara du territoire contesté. Aussitôt le gouvernement britannique, interprétant à la lettre la clause du traité par laquelle il devait à l’émir assistance en cas d’agression non provoquée, fit entendre ses réclamations à Saint-Pétersbourg, activa ses armemens, concentra des troupes à la frontière afghane, et des négociations aboutirent au traité de Saint-Pétersbourg du 22 juillet-3 août 1887, qui fixa une y nouvelle frontière entre