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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 février.


Dans quelques années, dans quelques mois peut-être, on sera étonné, nous en sommes convaincus, de l’émotion, de la surexcitation et des violences provoquées par les inventaires des biens des églises. Comment les expliquer ? Certes, des atteintes autrement graves ont été portées depuis quelque temps à la liberté des consciences, et si elles ont causé aux catholiques des angoisses très vives, elles n’ont pas suscité de leur part de résistances matérielles. Pourquoi cette révolte s’est-elle produite précisément à propos des inventaires ? La vérité est sans doute qu’ils n’ont été qu’une occasion, et que l’explosion qui s’est produite est le résultat d’une longue série de vexations de toutes sortes, et même de persécutions, dont les catholiques ont été les victimes. Il y a dans leurs cœurs tout un arriéré d’amertumes, toute une accumulation de griefs très légitimes qui, subitement, ont renversé la digue devenue impuissante à les contenir, et c’est l’explication psychologique des manifestations de ces derniers jours. Mais expliquer n’est pas justifier. Il y a eu, autour des églises et dans les églises mêmes, de véritables émeutes. Des rixes se sont produites, des coups ont été échangés, un préfet a été à moitié assommé, les pharmacies voisines ont été remplies de blessés, dont aucun par bonheur ne l’a été gravement. Tout cela pour les inventaires ! Tout cela par le fait des catholiques, singulièrement oublieux des paroles divines prononcées au Jardin des Oliviers, lorsque Pierre ayant tiré l’épée, Jésus lui ordonna de la remettre au fourreau en disant : Quiconque frappera de l’épée périra par l’épée !

A-t-on bien songé à ce qu’est un inventaire ? Si on l’avait fait, on n’aurait pas parlé de spoliation au sujet d’une opération administra-