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sement soulevée par le docteur Henry Cazalis (Jean Lahor) dans son livre Science et Mariage. Comme je l’ai dit ailleurs[1], je ne crois pas qu’on doive essayer de la résoudre par les lois, mais par les mœurs. Une loi de coercition, édictant des peines, n’aboutirait à rien : les malhonnêtes passeront toujours à travers.

Il faut apprendre aux pères de famille qu’avant de décider un mariage, leur devoir (en même temps que leur intérêt, l’intérêt de la famille et l’intérêt de la race), leur devoir est de réunir et de faire consulter entre eux, non seulement les notaires, mais aussi les médecins des deux familles, en leur donnant très honnêtement tous les élémens nécessaires d’information et en s’engageant à obéir aveuglément au verdict de ces médecins, quel qu’il soit et sans leur demander les motifs de leur décision. Pour la demi-folie en particulier, c’est absolument la seule manière possible de procéder. La gamme des demi-fous est trop étendue, la question de leur classification est trop délicate pour qu’on puisse donner des formules générales. Dans chaque cas, c’est une question d’espèce et que, seuls, les médecins peuvent résoudre.

Pour l’administration de leurs biens, on peut appliquer à ces demi-fous l’article 499, d’après lequel le sujet ne peut plus « désormais plaider, transiger, emprunter, recevoir un capital mobilier, ni en donner décharge, aliéner ni grever ses biens d’hypothèques, sans l’assistance d’un conseil qui lui sera nommé par le même jugement. »


3o Le demi-fou a commis un délit ou un crime : comment la société doit-elle se comporter vis-à-vis de lui ?

D’abord, et avant tout, elle doit consulter les médecins et leur demander de bien étudier et de caractériser l’état psychique du sujet et le degré de sa responsabilité.

Dieu merci, nous ne sommes plus au temps (cité par Trélat) où l’on pouvait écrire : « Qu’avons-nous besoin du secours de la médecine pour apprécier les désordres de l’intelligence ?… De bonne foi, il n’est aucun homme d’un jugement sain qui n’y soit aussi compétent que M. Pinel ou M. Esquirol et qui n’ait encore sur eux l’avantage d’être étranger à toute prévention scientifique. » Ceci était écrit en 1826 et 1830. Mais, bien près de nous, un procureur général a pu dire que « accepter l’irres-

  1. Voyez la Chronique médicale du 15 juillet 1903, p. 463, et du 15 février 1905, p. 101.