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et un des amis intimes de M. Chamberlain, mais qui s’est séparé de lui sur la question du libre-échange, veut organiser une manifestation publique en faveur des libéraux. Il a demandé à M. Chamberlain son intervention pour qu’il empêche ses partisans de troubler l’ordre dans la rue à cette occasion. M. Chamberlain a répondu par une lettre peu courtoise qui signifiait : « Adressez-vous à la police. »

13 janvier. — Que se passe-t-il donc ? Le même soir, à la même heure, voici les chefs de la Liberal League qui se réveillent comme d’un songe. Au lieu des phrases équivoques qu’on avait entendues il y a deux mois, ils donnent au public les déclarations les plus nettes et les plus catégoriques sur la question du Home-rule. Sir Henry Fowler va jusqu’à dire ceci : « Nous allons obtenir une majorité au nom du Free Trade. Si nous nous servions d’une majorité ainsi obtenue pour donner à l’Irlande l’autonomie parlementaire, nous commettrions une action malhonnête, un véritable abus de confiance. » Très bien ! mais alors, que subsiste-t-il du discours de Stirling, et pourquoi n’est-ce pas lord Rosebery qui gouverne au lieu de Campbell Bannerman ?

Même jour. — Cela commence bien pour les libéraux. Une seule élection : c’est un gain pour eux.

14 janvier. — Le scrutin d’hier produit un effet immense dans le pays. Vingt-deux sièges ont passé aux mains des libéraux. M. Balfour est jeté hors du Parlement, et Manchester est pris d’assaut par Winston Churchill qui conduisait les troupes libre-échangistes.

16 janvier. — Maintenant, c’est Londres qui suit l’exemple de Manchester. Les libéraux qui n’étaient là qu’une poignée vont devenir la majorité dans la députation londonienne.

C’était hier l’élection à Croydon. Des cris, du désordre, des rixes, surtout vers le soir.

Les murs étaient couverts de caricatures, d’un travail assez grossier, où les différens partis se tournaient en ridicule les uns les autres. Beaucoup de particuliers manifestaient leurs opinions en affichant à leurs vitres des placards où l’on pouvait lire, de loin, en grosses lettres : « Vote for Somerset, vote for Arnold Forster, vote for Stranks… »

Le parti du travail avait formé une procession qui parcourait les rues principales. Un pauvre âne, peint aux couleurs conservatrices, traînait une petite charrette où l’on voyait deux