satisfait sur ce point particulier. Le sera-t-il jamais sur les intentions de l’Empereur lui-même, pendant cette dernière tourmente ?
Arrivera-t-on jamais à préciser ses intentions, en torturant les soi-disant principes absolus de la guerre, qui sont surtout fondés sur la manière de faire habituelle de Napoléon lui-même ?
Ou faudra-t-il se contenter d’une explication de poète, analogue à celle que donne Chateaubriand au sujet du retour de l’île d’Elbe[1], quand, après avoir blâmé sévèrement cet acte, il s’écrie : « … Pour les êtres de la nature de Napoléon, une raison d’une autre sorte existe ; ces créatures à haut renom ont une allure à part : les comètes décrivent des courbes qui échappent au calcul… ; s’il se trouve un globe sur leur passage, elles le brisent et rentrent dans les abîmes du ciel ; leurs lois ne sont connues que de Dieu… Ce n’est pas tout de naître pour un grand homme : il faut mourir… »
Ou bien encore, peut-on simplement admettre que, le jour de Waterloo, l’esprit de l’Empereur a plané bien au delà de ce champ de bataille ; qu’il a songé non seulement aux ennemis qu’il avait directement devant lui, mais à l’Europe entière se levant pour envahir nos frontières ; qu’il a senti la nécessité, pour la France comme pour sa propre gloire, d’obtenir, non pas un succès ordinaire en Belgique, mais un écrasement complet des Anglais d’abord, et ensuite des Prussiens talonnés par Grouchy ; et que, pour chercher à atteindre ce résultat, il a tout bravé, même la catastrophe ?
Quoi qu’il en soit, il se dégage une leçon lumineuse, grave, de la comparaison, que nous ont permis de faire le général von Lettow et M. Henry Houssaye, entre la manière d’agir de l’état-major prussien et celle de l’état-major français.
D’un côté, nous voyons un état-major ne prévoyant rien ; attendant les ordres de l’Empereur ; les transmettant parfois très mal, à l’aide d’officiers insuffisamment préparés, insuffisamment orientés ; ne songeant ni à surveiller, ni à faciliter l’exécution des décisions impériales…
- ↑ Mémoires d’Outre-Tombe, 3e partie, livre IV.