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En certains cas les paroles réparties entre le soliste et le chœur pouvaient s’accorder beaucoup mieux entre elles, comme en cet autre roondet de carole, où les danseurs chassent de leurs rangs « ceux qui n’aiment mie » :


Voist en la (a) qui n’aime mie,
Voist en la !
N’est pas de ne compaignie (b)..
Voist en la qui n’aime mie !
Ne ja nul jor ili ; sa vie
N’en sera.
Voist en la qui n’aime mie,
Voist en la[1] !


Ici les paroles se suivent si bien qu’on pourrait les attribuer toutes à un seul chanteur, et l’on est souvent en peine, à lire des couplets comme celui-ci, de décider si l’on est en présence d’une chanson à danser :


En riant, cuer dous,
Jointes mains vous prie
Qu’aie vostre amour,
En riant, cuer dous.
Onques envers vous,
Ne pensai folie.
En riant, cuer dous,
Jointes mains vous prie[2].


Par là, perdant peu à peu toute attache avec la danse, le rondeau devint une simple forme strophique, qui engendra au XVe siècle les jeux compliqués des rhétoriqueurs : rondeaux doubles, rondeaux pleins, à sept manières, rondeaux jumeaux, rondeaux doubles layés, rondeaux doubles redoublés, rondeaux entés en ballades, etc.

C’est là, pour nous en tenir à ce bref résumé des travaux de nos devanciers, la forme coutumière, et comme classique, de la danse d’alors : le meneur de la carole chante avant, c’est-à-dire entonne un couplet dont certains vers, formant refrain, sont répétés par les autres danseurs. Mais les chants se partageaient-ils toujours aussi simplement entre un soliste et le chœur ? Les

(a) Qu’il s’en aille là, celui qui n’aime pas ! — (b) Il n’est pas de notre compagnie.

  1. Motets, II, 25.
  2. Ibidem.