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artillerie est impuissante contre le village défendu par de l’infanterie. L’attaque échoue et il se met en retraite à 9 heures du matin. Le 28, il se replie sur Baovidjaï. Le temps est très mauvais, et, malgré l’extrême fatigue, les troupes conservent un excellent moral. Les journées des 29 et 30 sont tranquilles, car les Japonais n’avancent plus, ils se retranchent. Enfin de l’infanterie est envoyée et la cavalerie peut se reposer. Les Japonais ne prirent l’offensive que le 6 juillet.

Ainsi la cavalerie du général Samzonoff a mis 23 jours pour céder 60 kilomètres, tantôt reculant, tantôt avançant, toujours accrochée à l’ennemi, surveillant ses mouvemens, mais ne pouvant pas donner des renseignemens suffisans pour fonder sur eux une opération. Elle s’est parfois trouvée à 30 kilomètres des colonnes et elle était souvent gênée par ce fait, que sa ligne d’avant-postes et quelquefois même ses cantonnemens étaient fixés par le général commandant le 1er corps sibérien. Lorsque pendant l’intervalle de temps qui s’écoulait entre le moment de la transmission des renseignemens et l’heure de la réception des ordres, les circonstances avaient changé, la situation devenait très difficile. Même lorsque l’infanterie était à proximité, le général Samzonoff ne pouvait pas faire reposer les chevaux, parce qu’il avait l’ordre de toujours tenir sa cavalerie en avant de l’infanterie. Des unités sont restées parfois 72 heures sans desseller. Dans toutes ces opérations, elle n’a pu agir que comme infanterie montée ; mais insuffisamment exercée au tir, n’ayant qu’une artillerie trop légère, elle n’a jamais pu percer les rideaux japonais. Il faut ici faire observer que les Russes ont mis en pratique les prescriptions de Napoléon citées dans la Revue des Deux Mondes du 1er mars 1904, et relatives aux éclaireurs d’infanterie. Chaque régiment a formé un groupe de 140 hommes montés sur de petits chevaux, de sorte qu’il n’a pas été nécessaire de détacher des cavaliers pour faire le service de cavalerie divisionnaire. Nous reviendrons plus loin sur cette importante question. Le groupe d’éclaireurs montés du 13e régiment de chasseurs de Sibérie coupé de Port-Arthur, lors du débarquement des Japonais au sud de Bétsivo, avait rallié le général Samzonoff. Il a rendu de signalés services. Composé d’hommes et d’officiers choisis, vite aguerri par son continuel contact avec l’adversaire, il opérait avec adresse. Son commandant le déployait sur un grand espace, ne conservant aucune