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qu’il n’ait pas de couronne à mettre sur sa tête ! Dès demain matin, il y a guerre entre nous ! »

Et vraiment, le lendemain matin, voilà le roi Hans qui réunit tous ses soldats en un tas, et qui commence la guerre contre le roi Clas. Et, avant qu’il soit longtemps, le voilà qui chasse le roi Clas de son palais et de son royaume, et l’oblige à s’en aller par le monde, avec sa femme et son petit Éric. Tout ce qu’il a, le roi Clas, il faut qu’il le laisse derrière lui. Il n’y a que sa couronne et son sceptre, ces deux choses-là il réussit à les sauver. Outre cela, il ne peut rien emporter qu’une couple de marks, tout juste ce qu’il avait d’argent dans ses poches.

Et voilà que, un jour, comme tout l’argent était dépensé, le roi Clas dit à sa femme : « Ma couronne et mon sceptre, je pourrais peut-être les vendre ! Sans royaume et sans sujets, je n’en ai plus besoin ! » Mais sa femme lui répond : « Non, nous ne devons pas faire ça ! Nous devons garder ces deux choses pour notre petit Éric. A défaut de mieux, ce sera toujours quelque chose qu’il pourra avoir après nous !»


Le malheureux roi Clas, « qui n’avait appris qu’à régner, » est forcé d’apprendre un autre métier. Installé dans une cabane, au milieu d’une lande d’ajoncs, il se met à faire des balais, que sa femme, ensuite, va vendre au marché. « Et, trois fois par an, aux grandes fêtes, ils se rendaient à l’église, dans la paroisse la plus voisine. Alors, toujours le roi Clas se coiffait de sa couronne, et tenait son sceptre à la main. Et les gens d’ouvrir de grands yeux, et de se dire : « Regardez donc un peu le vieux faiseur de balais ! Hein ! quel beau chapeau il a là ! et quelle belle canne ! » Le récit de la rencontre du jeune ouvrier Éric et de la princesse Érica sur la lande, a tout le charme naïf et piquant d’une idylle « vécue. » Et Éric se marie avec la princesse et règne avec elle sur les deux royaumes, « car le roi Hans et le roi Clas ont pris leur retraite, et ont recommencé à jouer au soixante-six, pendant que leurs femmes s’occupent à leur cuire du bon café au lait. Et si leur dernière partie n’est pas achevée, ils doivent jouer encore. »


Des vingt-neuf autres contes qui forment le recueil, une dizaine environ se trouvent être, pareillement, des adaptations de vieux thèmes populaires. C’est, par exemple, l’histoire du troisième frère, que ses parens dédaignent comme un simple d’esprit, et qui, cependant, parvient seul à guérir la fille du roi ; ou bien c’est l’histoire de la petite sœur à qui sa mère, en mourant, a confié la garde de son petit frère, et qui aime mieux souffrir tous les maux que de l’abandonner. Mais non seulement les auteurs ont su, presque toujours, entourer ces vieilles fables d’un très ingénieux appareil de circonstances nouvelles,