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En attendant l’apparition de la Patrie et de ses congénères, nous avons la consolation de posséder un premier cuirassé non chavirable, le Henri IV ; celui-ci, en raison de son faible déplacement, ne présente sans doute pas une puissance militaire de premier ordre, mais il a le mérite d’expérimenter un système de protection entièrement nouveau et certainement efficace pour les cuirassés de haute mer. Le Henri IV, dont nous avons indiqué les péripéties en 1896, et dont la conception est postérieure de cinq ans à celle de la Patrie, dérive, dans une certaine mesure, des deux projets de monitors à flottaison cellulaire préparés en 1870 et en 1878 ; mais il en diffère, ainsi que de tous les monitors passés, par des innovations assez étendues pour avoir entièrement transformé leur rôle militaire.

Les monitors présentent deux défauts, sous le double rapport de l’habitabilité et de la marche mer debout, qui les confinent dans le service de gardes-côtes. Ils ont, en revanche, une qualité qui leur serait précieuse comme bâtimens de haute mer, celle de rouler très peu. Le but visé dans la conception du Henri IV, a été de supprimer les deux défauts et de conserver la qualité. Sur le Henri IV, tous les logemens sont établis dans une superstructure présentant les conditions d’hygiène requises pour les plus longues opérations à la mer. Cette superstructure dote le bâtiment d’un avant de croiseur, et lui assure les qualités correspondantes de marche mer debout. Cette même superstructure se restreint, au milieu du navire, de manière à cesser de coopérer à la stabilité, et à livrer à la mer deux plages destinées à combattre le roulis comme sur les monitors ; elle s’arrête, à l’arrière, de manière à y produire un second effet de plage efficace à la fois contre le tangage et contre le roulis. Le Henri IV n’est donc point un garde-côtes ; il sera, au contraire, le plus marin des cuirassés de haute mer, si l’expérience, seul arbitre en ces questions, montre que les plages donnent les résultats attendus au point de vue des qualités nautiques.

Les détails précédens sont destinés, la question étant d’importance, à imposer l’impartialité dans les jugemens sur le Henri IV, et à mettre on garde contre le dédain affecté par les quelques attardés de la flotte chavirable et par leur clientèle. Revenons aux considérations spéciales à la puissance défensive.

L’efficacité du caisson cuirassé et cloisonné, pour la protection de la stabilité après avaries, peut, comme nous savons, être