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seule précaution avait consisté à surélever le pont blindé, dans la région axiale du navire, de manière à lui faire englober, au-dessous de lui, un volume de carène un peu supérieur au déplacement du navire. La flottabilité, recherchée par un tel moyen, ne pouvait être obtenue que qu’ille en l’air, en supposant les écoutilles closes. Le chavirement était assuré dès la première brèche. L’erreur de principe commise, bien apparente à la seule inspection du plan, s’est trouvée confirmée authentiquement, par une tentative de justification de l’auteur en date du 17 février 1891, d’après laquelle le remède au défaut signalé aurait consisté à établir un tuyautage transversal permettant à l’eau de se répandre également sur les deux bords du navire. La cause première des obstacles opposés à l’établissement d’un système de protection efficace a donc été la confusion entre la notion d’équilibre et celle d’équilibre stable. On avait oublié que l’eau, abandonnée à elle-même, a l’habitude de descendre toujours, sans remonter jamais.

On a dû en entendre de belles, au pays des ombres, si M. Reech, une des gloires les plus ignorées de la science française, y est chargé, comme il en a tous les droits, de demander compte de leurs erreurs en stabilité, aux quarante promotions d’ingénieurs qui, sur le globe sublunaire, ont subi ses doctes, mais chaotiques leçons. L’auteur de la note du 17 janvier 1891 avait sûrement mérité une de ces tonitruantes objurgations, que rehaussait le pur accent d’Alsace et dont je n’ai pas perdu le souvenir ; il n’a pu que courber l’échine sous l’averse. J’ai travaillé, pour ma part, à m’assurer, en vue des éventualités futures, le pardon pour mes peccadilles passées de mauvais élève. Tout le monde n’a pas été aussi sage.

Les erreurs commises en France, les seules dont j’ai parlé, ont eu du moins un mérite, celui du silence et de la modestie. Il s’en est produit d’autres, et de non moindres, sur des navires construits à l’étranger, qui ont eu les honneurs d’une presse dithyrambique.

En continuant à suivre l’ordre chronologique, nous arrivons à une classe nouvelle de croiseurs, plus grands et plus puissans, qui se sont d’abord appelés croiseurs de combat, et qui sont en réalité des contre-croiseurs. L’apparition de ces bâtimens peut être regardée comme la conséquence de la multiplication rapide des croiseurs proprement dits, qui, bien ou mal protégés,