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elles n’étaient assez vagues, sous leur précision apparente, et assez perfides, quoique d’ailleurs indéterminées.

Qu’est-ce en effet, d’abord, que « les règles de l’organisation générale d’un culte, » et qui sera chargé d’en définir la nature ? « D’après le Projet de Loi présenté au Parlement, — écrivaient, le 28 mars 1905, au président de la République, nos cardinaux français, — l’existence de l’Eglise, après la séparation, serait soumise au régime des associations cultuelles. Or, ces associations, organisées en dehors de toute autorité des évêques et des curés, sont, par là même, la négation de la constitution de l’Église et une tentative formellement schismatique. Le vice essentiel des associations cultuelles est de créer une institution purement laïque pour l’imposer à l’Eglise catholique[1]. » Et, à la vérité, quand nos cardinaux s’exprimaient ainsi sur le danger des Associations cultuelles, il n’était point écrit encore dans la loi que ces associations devraient être « conformes aux règles de l’organisation générale du culte dont elles se proposeraient d’assurer l’exercice ! » Mais cette « concession, » si péniblement arrachée à la Chambre par l’éloquente et généreuse obstination de M. A. Ribot, en est-elle vraiment une ? et qui ne voit aussitôt quelle difficulté nouvelle s’est, pour ainsi dire, substituée à l’ancienne, si désormais la conformité « aux règles de l’organisation générale du culte » fait partie intégrante et constitutive de la définition même de l’Association cultuelle ? Au regard de l’État, et d’après les termes précis de l’article 4, il ne saurait y avoir d’Association cultuelle que celle qui prouvera d’abord sa conformité avec « les règles de l’organisation générale du culte ; » mais cette conformité, comment, par quels moyens, sur quelle base l’établira-t-elle ? C’est ce que la loi a négligé de dire. Il faudra nécessairement que l’assemblée des évêques le dise, et qu’elle n’attende pas, pour le dire, les jugemens des tribunaux ou un arrêt du Conseil d’État. Si ce texte a quelque signification, il n’appartient évidemment qu’à l’Église catholique, et à elle seule, de dire quelles sont les « règles de l’organisation générale » du culte catholique.

Rien ne sera plus délicat ; et on nous pardonnera d’en indiquer

  1. On trouvera ce document, avec beaucoup d’autres, dans un livre excellent, que nous sommes un peu confus de n’avoir pas signalé plus tôt aux lecteurs de la Revue : c’est L’histoire, le texte et la destinée du Concordat de 1801, par M. l’abbé Emile Sevestre, Paris, 2* édition, 1905, P. Lethielleux.