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les luttes électorales ; on ne veut point qu’il tombe d’autres conseils du haut de la chaire chrétienne que des conseils de morale et de piété. Et, encore une fois, je n’approuve ni ne désapprouve. Ou plutôt si ! je désapprouve, et j’accorde qu’il soit monstrueux de permettre à l’instituteur ou au professeur d’Université, contre tout ce que représentent l’évêque, ou le curé du village, une liberté de parole que l’on refuse à ceux-ci ! Mais le fait est là. Il faut compter avec le fait. Si l’on ne peut l’empêcher d’être, — et le plus souvent, comment le pourrait-on ? — c’est inutilement qu’on récrimine. Et c’est pourquoi, comme citoyens, nous nous occuperons de politique autant qu’il nous plaira ; nous nous en occuperons même comme catholiques, et ce sera notre affaire ; mais ce sont nos curés et nos évêques, en tant que « ministres du culte, » et, dans « l’exercice des fonctions du culte, » qui ne devront pas s’en occuper ; et, sans doute, après leur en avoir elle-même donné l’exemple, c’est ce que l’assemblée du clergé de France voudra leur dire, avec l’autorité qui lui appartiendra.

D’autres questions solliciteront alors son attention, et, entre autres, celle de la nomination des évêques eux-mêmes. Il y a pour le moment seize sièges vacans dans l’Eglise de France, ou même dix-sept, en comptant l’archevêché d’Alger, et il est probable que le Souverain Pontife y voudra nommer des titulaires de son choix, qu’il ne prendra, nous croyons le savoir, ni parmi les étrangers, ni parmi les membres des congrégations expulsées. Nous espérons d’ailleurs que ces nominations précéderont la réunion de l’assemblée des évêques. Mais, ces nominations une fois faites, l’Église de France demandera sans doute, et obtiendra, que les nominations épiscopales se fassent à l’avenir comme elles se font, par exemple, aux États-Unis, dans les conditions établies par le troisième concile plénier de Baltimore, en 1884[1]. Aux États-Unis, quand un siège vient à vaquer, les conseillers du diocèse, — consultores, — qui sont, selon les diocèses et les ressources du lieu, six, quatre ou deux prêtres, remplaçant dans la hiérarchie de l’Église d’Amérique nos chanoines capitulaires, dressent, avec le concours des recteurs ou curés inamovibles, une liste de trois candidats. Cette liste est transmise aux évêques

  1. Comme je cite plusieurs fois les Actes de ce concile, j’avertis que j’en emprunte le texte à la publication officielle : Acta et Decreta Concilii Plenarii Baltimorensis Tertii, etc., Baltimorœ, Typia Joannis Murphy, MDCCCXCIV.