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indicateur de la route commandera aux vaisseaux en partance sur le fleuve. Une statue équestre de Guillaume Ier a été récemment inaugurée devant l’Hôtel de Ville. À Hambourg comme partout, on a docilement imité les dispositions consacrées à Berlin pour ces sortes de monumens : le vieil empereur se dresse au centre d’un exèdre de marbre ; sur les parois revêtues de métal, des bas-reliefs représentent son couronnement, son entrée dans la ville qui le commémore.

Où ne l’ai-je pas rencontré, ce cavalier de bronze qui chevauche à travers l’Allemagne, toujours coulé dans le même moule ? Il occupe la place d’honneur dans chaque ville de quelque importance, à moins qu’il n’y garde l’entrée des ponts jetés sur les grands fleuves. Ses deux acolytes, Bismarck et Moltke, voisinent avec lui, leurs médaillons timbrent les arches de ces ponts. Je retrouve à la Kunsthalle de Hambourg, j’ai vu dans tous les autres musées la trinité peinte par Lenbach. On s’étonne qu’il ait suffi d’une vie au maître de Munich pour reproduire à de si nombreux exemplaires ses modèles officiels. Dès l’entrée, le visiteur va droit au panneau où l’appellent les portraits fatidiques, il s’arrête comme hypnotisé par la longue projection d’histoire qui éclaire les faces volontaires des trois vieillards. — Eh quoi ! Déjà dans la légende, et avec quel recul, ces contemporains que j’ai connus ! Je revois Guillaume Ier, son visage de vieux gentilhomme correct et placide, à la fenêtre du petit palais de Berlin où il se montrait volontiers. Je revois le mufle de dogue et les sourcils broussailleux de Bismarck, au fond du coupé que l’on croisait en sortant du Kaiserhof sur la Wilhelmstrasse, et qui allait déposer le chancelier à la porte de son modeste logis. Si haut qu’ils fussent, et si chargés de grandes choses, ces hommes étaient alors, — hier, — des créatures comme nous tous, soumises à toutes les misérables chances de la vie, objets de discussion, d’animadversion pour beaucoup. Sur ces mêmes pavés où nous marchons encore, nous les vîmes marcher du pas humilié qu’ont les plus glorieux, quand ce pas s’alourdit à proximité de la tombe. Et déjà, pour ces jeunes Allemands attroupés devant leurs statues, Guillaume est déifié, stellaire au firmament de l’histoire ; il s’estompe dans le passé légendaire, autant qu’un Barberousse et au même plan lointain. Bismarck et Moltke sont héroïsés dans un Walhalla où l’admiration ne souffre plus que l’on discute ces demi-dieux.