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un voyage à sparte.

Le voyageur. — C’est possible, mais vous avez tort de ne pas vous demander à quoi vous servez. Vous êtes destinés à aménager l’univers pour nous faire plus nobles, plus délicats, plus poètes. Très souvent vous nous y aidez. Mais je voudrais que vous ne nous gênassiez jamais. Ici, au début, voyez-vous, vous étiez la science au service de l’art, mais petit à petit, l’esprit géométrique, chez vous, a étouffé l’esprit de finesse. Tenez, vous finirez par rebâtir le Parthénon.

Le pensionnaire. — Ce serait très facile. Mais avant de le rebâtir, nous allons achever de le démolir ; car nous sommes très curieux pour le moment de savoir comment tiennent ses fondations.


VII. — PHIDIAS


Devant Phidias, comme devant Thucydide, je sens moins la difficulté de se comprendre si l’on n’a pas le même sang : je ne puis contester que Phidias me fournit une beauté qui semble devoir être de la beauté pour tous les hommes raisonnables. Il m’est impossible de pénétrer toute la raison d’être d’un Socrate, d’un Platon ; pour me plaire dans leurs interminables discussions, à la fois délicieuses et fastidieuses, je soupçonne qu’il me faudrait un sens spécial, comme j’ai un sens, par exemple, pour goûter l’ingénue surabondance d’un Théodore de Banville ; mais devant Phidias, ne faisons pas le récalcitrant. Celui-là justifie les enthousiastes qui d’abord me choquaient en parlant d’absolu et de miracle grec. Il y a une distance immense entre Phidias et ses contemporains, entre Phidias et ses prédécesseurs, entre Phidias et ses successeurs. Il est le sommet où l’on mesure le plus haut génie de l’art grec. Je n’ignore pas que certains savans tiennent Phidias, comme Raphaël en Italie, pour le commencement de la décadence ; c’est une opinion où je me range si elle revient à dire, comme je crois, que la fleur en s’épanouissant annonce son déclin. Quoi qu’il en soit, j’aurai beaucoup fait pour mon intelligence de la Grèce, si je puis approcher, entrevoir la pensée vivante, le modèle moral que portait en soi un Phidias, et sur lequel il a exécuté son œuvre.

Je parle du modèle moral d’après lequel travaillait Phidias, c’est que je suis mieux préparé pour m’avancer dans l’ordre de la moralité que dans le domaine de l’art plastique. Je ne suis