Olympe, dans sa conscience d’historien et d’artiste. Chez ce grand Aryen vivent côte à côte toutes les formes de l’idéal. Ménard n’a pas jeté le cri blasphémateur de James Darmesteter, un cri dont Leconte de Lisle se convulsait de plaisir. James Darmesteter, âpre prophète d’Israël, a vu dans un songe le Christ tombé du ciel et assailli par les huées des mille dieux qu’il avait détrônés : « Te voilà donc blessé comme nous, Galiléen, te voilà semblable à nous. Ta splendeur s’est éteinte et tes lyres se sont tues. » Ménard n’admet point qu’aucune splendeur se soit éteinte, ni qu’aucune lyre se soit tue. Il prophétise la communion universelle des vivans et des morts, la grande paix des dieux. Et, spécialement, il honore dans le christianisme l’héritier de la morale grecque. Entre tous les grands systèmes encore vivans de philosophie sociale, seule la doctrine du Christ fait une place pour l’énergie virile de la lutte contre soi-même, pour l’héroïque effort de la volonté ; elle établit la suprématie de l’âme sur les attractions du dehors.
Toutefois, pour nuancer exactement la pensée chrétienne de Ménard, observons qu’il disait : « Je ne puis être chrétien, qu’à la condition d’être protestant, car je tiens absolument à garder mon droit illimité de libre examen et d’interprétation. » Peut-être suivait-il là une inclination de famille ; je suppose que c’est lui-même qui parle, quand il fait dire à un personnage de ses petits dialogues : « Mon trisaïeul est mort dans la persécution qui suivit la révocation de l’Édit de Nantes et ses enfans ont été convertis au catholicisme par autorité du roi. » Plus sûrement, il subissait les mêmes influences intellectuelles qui décidèrent un Taine, né catholique et devenu un pur stoïcien, à réclamer pour son enterrement un pasteur. Dans ce temps-là, Renouvier, l’ami de Ménard, voulait protestantiser la France. Il faudra qu’on étudie un jour comment la crise de 1870-71 obligea et oblige encore les libres penseurs individualistes à reconnaître la nécessité d’un lien social, d’une religion.
La Grèce avait été présente sous chacune des pensées et l’on peut dire sous chacun des actes de Ménard. C’est sur la guerre de l’indépendance hellénique, de 1821 à 1828, qu’il fit ses dernières leçons. Ce suprême hommage à ses chers Hellènes fut d’ailleurs annulé par l’étrange manie où il venait de tomber.
Vers la fin de sa carrière, ne s’avisa-t-il pas de se passionner