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du moment qui ne sauraient se faire que sur les lieux. Quant au Droit mosaïque, je n’ai pas ici l’ouvrage de Michaëlis. Il faut qu’aidé de vos conseils, il juge lui-même de ce qui peut intéresser en France.

Adieu, très cher ami ; je vous embrasse tendrement.


Paris, 4 mai 1826.

J’ai reçu à la fois vos deux dernières lettres[1], mon cher et excellent ami, et j’y aurais répondu plus tôt, comme vous le pensez bien, si j’avais pu trouver depuis lors un moment de loisir. Il est triste que vous rencontriez toujours le même obstacle à vos projets ; c’est, au reste, la même chose partout : Omnes quænmt quæ suasunt, non quæ J. C. Je goûte peu la modification que vous paraissez vouloir apporter à vos premières idées. Ce n’est au fond qu’un changement de personne, et la difficulté ne sera pas moindre pour l’obtenir. Après tout, vous en êtes beaucoup meilleur juge que moi.

Les journaux vous auront appris l’issue de mon procès[2]. J’ai longtemps pesé les avantages et les inconvéniens d’un appel, par rapport aux intérêts de l’Eglise. Je me suis enfin décidé à m’en tenir au premier jugement, dont l’autorité est presque nulle en jurisprudence, tandis qu’un arrêt de la Cour royale qui aurait déclaré l’édit de 1682 loi de l’État (et cet arrêt n’était pas douteux), eût entraîné pour la religion des conséquences funestes. J’ai dû sacrifier, en cette circonstance, tout ce qui était de ma position personnelle à de plus graves considérations. Au surplus, j’ai annoncé que je continuerais de défendre les principes établis dans mon ouvrage, et c’est ce que je ferai. Je n’attends pour cela que la publication de l’écrit de l’évêque de Chartres[3], qu’on

  1. Nous avons une lettre de M. Vuarin à Lamennais, datée du 27 mars : c’est probablement la première des deux, dont il s’agit ici.
  2. Le procès qui lui avait été intenté pour son livre, la Religion, etc. (Cf. la lettre de Lamennais à Mme de Senfft, 24 avril 1826, dans Forgues, Correspondance, nouvelle édition, 1863, t. I, p. 246-249.)
  3. Clausel de Montals (1769-1857), l’un des quatre frères Clausel. Il avait écrit à Lamennais « qu’il n’avait pu se dispenser de prendre la défense de Frayssinous, son intime ami et son parent. » Le gouvernement demandait aux évêques français de souscrire à la Déclaration de 1682. L’archevêque de Bordeaux avait répondu : « Laissez-moi mourir dans mon attachement aux vieilles erreurs de l’Église romaine. » (Cf. la lettre de Lamennais à M. de Senfft, 10 mai 1826, Id., ibid., p. 249-251.)