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REVUES ÉTRANGÈRES

UN TOURISTE ANGLAIS AU TEMPS DE SHAKSPEARE


Caryat’s Crudities, hastily gobled up in five Moneths travells in France, Savoy, Italy, Rhetia commonly called the Grisons country, Helvetia alias Switzerland, some parts of High Germany and the Netherlands ; newly digested in the hungry aire of Odcombe in the county of Somerset ; and now dispersed to the nourishment of the travelling members of this Kingdome, par Thomas Coryat. Nouvelle édition, 2 vol. in-8, illustrés, Glasgow, librairie Mac Lehose, 1905.


Le 14 mai de l’année 1608, un jeune Anglais, Thomas Coryat, s’embarquait à Douvres sur un bateau qui partait pour la France. Né en 1576 au village d’Odcombe en Somersetshire, où son père était pasteur, Coryat avait fait à Oxford de fortes études, et s’était ensuite acquis la faveur du prince Henri de Galles, qui lui avait procuré un emploi à la Cour. Latiniste excellent et bon helléniste, avec la figure et les manières d’un parfait gentleman, admis déjà dans l’intimité de tous les beaux esprits de Londres, les plus brillantes perspectives d’avenir s’ouvraient devant lui. Mais il avait toujours eu, dès l’enfance, le désir de voyager, pour connaître le monde : et bientôt ce désir était devenu si vif qu’il ne s’était plus senti la force de lui résister. Venise, en particulier, l’attirait invinciblement, cette « très glorieuse, incomparable, et vierge cité, » dont il venait de lire l’histoire, écrite par le cardinal Contarini, et « fort élégamment traduite en anglais. » Si bien que, abandonnant son emploi, il avait résolu de se mettre en route pour l’aller voir de ses yeux, malgré toutes les difficultés et tous les dangers d’une telle entreprise. Grâce, sans doute, à l’appui du prince de