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Norvège a été séparée du Danemark en 1814 à cause de la fidélité que ce dernier nous avait témoignée pendant les guerres napoléoniennes et du courage admirable qu’il avait déployé pour la défense de la liberté des mers. Comment, dès lors, n’applaudirions-nous pas au couronnement d’un prince danois à Christiania ? L’Angleterre y applaudirait aussi, ce qui montre à quel point tout est changé. Cette solution ne peut que convenir à nos sentimens particuliers.


Le traité anglo-japonais vient d’être publié. Nous en avions donné, il y a quinze jours, en réunissant les parties qui en avaient paru dans divers journaux, une analyse qui se trouve être parfaitement exacte. Il s’agit bien d’un traité d’alliance politique, militaire, économique, et il s’applique aux possessions du Japon en Extrême-Orient et à celles de l’Angleterre dans l’Inde. Il s’applique aussi au maintien de l’intégrité et de l’indépendance de la Chine. Une clause analogue a figuré dans d’autres traités où elle n’a pas eu beaucoup d’importance, mais elle pourrait bien avoir dans celui-ci plus de portée. C’est, on le voit, un vaste champ ! Le traité est conclu pour dix ans, et, naturellement, il pourra être renouvelé : il se prolongerait même de plein droit si on était en état de guerre au moment de l’échéance. Le point caractéristique de l’alliance est que l’Angleterre et le Japon se doivent leur appui mutuel, même contre une seule puissance, si l’un des deux est l’objet d’une agression non provoquée par lui. C’est, en somme, le traité d’alliance le plus formel, le plus étroit, le plus étendu que l’Angleterre ait conclu depuis longtemps. En le portant à la connaissance du gouvernement russe, l’ambassadeur d’Angleterre à Saint-Pétersbourg a été chargé d’attirer l’attention sur son caractère purement défensif. Enfin, dans la phrase finale de la dépêche du marquis de Lansdowne à sir Charles Hardinge, il est fait une allusion discrète, mais pourtant très nette, au fait que l’alliance nouvelle n’a pas été sans exercer quelque influence sur la conclusion de la paix à Portsmouth : et c’est ce que nous avions cru pouvoir aussi faire entendre.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

F. BRUNETIERE.