Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/699

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Entre ces délégués et leurs deux grands collègues, il y a une question de préséance et surtout une question d’origine, puisque, comme je l’ai dit, ces derniers doivent à leur rang social et à leur situation parlementaire d’arriver directement à la position éminente qu’ils occuperont pendant cinq ans, alors que les autres parviennent à leur grade, étape par étape. Ces distinctions échappent aux natifs, car la main qui les dirige est aussi ferme, aussi vigoureuse, aussi bien armée dans les provinces que dans les Présidences. Je dirai même que les lieutenans-gouverneurs, dont la période de séjour n’est pas limitée et qui ont pu acquérir une expérience plus complète, possèdent, en général, une influence morale plus grande sur leurs administrés et contractent, vis-à-vis du pays où ils ont passé leur jeunesse, où s’écoulera leur âge mûr, des liens de réciproque affection que ne sauraient former au même degré des missi dominici relativement éphémères.


III

Pour compléter ce que je viens de dire au sujet de la répartition de la puissance directrice dans les provinces, il est indispensable de donner ici quelques courtes indications relatives au fonctionnement des rouages qui font mouvoir l’ensemble du système.

Parmi les grands services, parlons d’abord de l’Armée.

Trois élémens, de valeur très inégale, la composent : le contingent européen, le contingent hindou qui forment les troupes régulières, le contingent fourni par les Native States (Etats indigènes), et qui forme les troupes auxiliaires. En voici les proportions : 72 000 Anglais, 157 000 Indiens, soit 229 000 hommes pour l’active ; 380 000 hommes et quatre mille pièces de canon pour la réserve. Ce total, qui dépasse, comme on voit, six cent mille hommes, paraît de nature à faire face à toutes les éventualités, mais il n’est formidable que sur le papier. A part les soixante-douze mille Anglais et quelques régimens de Sicks, l’armée régulière est de second ordre ; quant à l’armée auxiliaire, excepté le contingent de l’État de Gwalior, elle ne comprend que des mercenaires dépourvus d’instruction et dont le principal emploi consiste à parader. L’armée indienne est donc une illusion. Comment, d’ailleurs, en serait-il autrement,