Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/576

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Belfort, son territoire et les communes lorraines, les propositions conditionnelles des Allemands qui devaient être soumises à l’Assemblée nationale pour être ratifiées par elle dans un délai maximum de dix jours.

En conséquence, une Commission militaire extra-parlementaire fut instituée par les spins du général Le Flô, ministre de la Guerre, pour donner son avis sur ces propositions. Elle était présidée par le général de Chabaud-Latour, composée des généraux Chareton et Fournier, et du colonel Laussedat, secrétaire et rapporteur, et siégea à Versailles. En même temps, une Commission de l’Assemblée nationale, dont le rapporteur était le vicomte de Meaux, était chargée d’examiner les conditions de la paix et particulièrement la question d’échange des territoires.

Malgré les concessions accordées par les Allemands, le colonel Laussedat reprit, devant la Commission militaire, les argumens par lesquels il n’avait cessé de combattre l’échange. Convaincue que la forteresse de Belfort était désormais réduite à un rôle défensif, et que le rayon de 5 kilomètres suffisait à la rigueur pour la protéger, la Commission se prononça contre l’échange. Le colonel Laussedat alla jusqu’à avancer dans son rapport que l’Allemagne tenait d’autant moins à la vallée de Giromagny, que Belfort, restant à la France, continuait à commander la vallée de la Savoureuse (affluent du Doubs).

C’est ainsi que d’argument en argument, et en renchérissant toujours sur le précédent, on arrive parfois à de regrettables exagérations.

Belfort ne peut commander la vallée de la Savoureuse qu’autant que la tête de vallée, c’est-à-dire le Ballon d’Alsace et la route y aboutissant par le Sud nous appartiennent ; or, avec le rayon de 5 et même de 7 kilomètres dont le colonel Laussedat se contentait, Giromagny, le Ballon et le réseau des routes de Giromagny à Champagney, Dannemarie, Altkirch, Mulhouse et Cernay seraient restés aux mains des Allemands ; ils auraient, très probablement, construit à Giromagny un fort d’arrêt et Slevé de puissans ouvrages au Ballon ; les têtes de vallée de la Savoureuse et de la Moselle, qui se correspondent, nous auraient été fermées, et Belfort se serait trouvé, non seulement privé de tout commandement sur la première de ces vallées, mais même entravé dans ses moyens de défense.

En suivant l’œuvre des négociateurs, M. Thiers, avec sa