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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 septembre.


Il est heureux que le sultan du Maroc se soit décidé à nous donner pleine et absolue satisfaction dans l’affaire de l’Algérien Bou Mziam : heureux pour lui d’abord, car sa résistance, si elle s’était prolongée plus longtemps, ne pouvait pas tourner à son avantage ; mais aussi pour nous qui avons d’autres affaires au Maroc et qui désirons les traiter, s’il est possible, en dehors de toutes diversions. L’affaire Bou Mziam n’avait d’ailleurs aucun lien direct avec les questions pendantes entre l’Allemagne et nous ; elle en était absolument distincte, et c’est bien ce qu’on a compris partout.

On ne saurait nier, toutefois, que l’arrestation arbitraire de Bou Mziam n’ait été provoquée par l’état d’anarchie qui règne en ce moment au Maroc et dont l’attitude de l’Allemagne est en partie responsable. D’où est venue au Sultan l’audace, ou plutôt la témérité dont il s’est inspiré lorsqu’il a mis la main sur un de nos sujets ? Il a cru sans nul doute, et très à tort comme l’événement l’a prouvé, que la protection allemande le couvrirait, quoi qu’il se permit contre nous. Il s’est lourdement trompé. Quelles que soient les prétentions encore confuses de sa politique au Maroc, l’Allemagne est une nation européenne, civilisée, chrétienne : elle se sent solidaire de toutes les autres lorsqu’une atteinte est portée à ce qui constitue leur droit commun. L’arrestation de Bou Mziam n’était pas un coup porté seulement à la France, mais bien à l’universalité des puissances. Si nous avions montré la moindre hésitation, la moindre faiblesse, la diminution de prestige et d’autorité qui en serait résultée pour nous se serait immédiatement étendue à d’autres, et la sécurité de tous les étrangers au Maroc s’en serait ressentie. Aussi étions-nous rassurés du côté des puissances, quelles qu’elles fussent. Elles ne pouvaient qu’encourager nos efforts,