Seuls les résultats obtenus par l’Organisation de l’agriculture en Irlande peuvent donner quelque espoir ; depuis 1889 qu’existe la société de ce nom, les principes de coopération répandus parmi les fermiers ont élevé les crémeries irlandaises au rang de celles du Danemark, qui passent pour les meilleures du monde. Et d’autres industries locales se développent rapidement autour de l’industrie laitière ; en même temps, on a pu remarquer que l’Irlandais, aussitôt qu’il possède une parcelle de terre, devient conservateur au lieu de rester radical. Il a suffi, pour accomplir ce prodige, de l’impulsion donnée par un économiste, l’honorable H. P. Plunkett, fort au courant des conditions industrielles modernes de différens pays.
Pourquoi l’organisation et la coopération en matière d’agriculture ne s’introduiraient-elles pas dans le reste du Royaume-Uni ? Les révolutions pacifiques n’y ont jamais été rares. Des particuliers donnent l’élan, des agences volontaires se forment et l’Etat finit par s’en mêler. Qui sait si les desiderata proposés par M. Richard Whiteing ne se réaliseront pas à la fin ? Moins de parcs, plus de champs labourés, l’exploitation de la terre réglée sur des principes d’affaires qui lui feront rendre assez de blé tout au moins pour nourrir l’Angleterre, de bons gages aux bons travailleurs, des marchés bien organisés, les chemins de fer mis au service de l’agriculture, au demeurant moins de poor taxes libéralement payées par le propriétaire et plus d’indépendance pour le tenancier, qui s’attend trop à être secouru. Ce programme n’a rien d’extravagant et on peut compter sur les surprises que nous réserve un pays où les plus grosses réformes s’opèrent sans fracas, la machine sociale toujours solide, quoi qu’on en dise, sachant adapter ses rouages, elle l’a maintes fois prouvé, aux besoins du temps, et les classes dirigeantes montrant une inépuisable bonne volonté à favoriser le progrès, pourvu que des voix autorisées le réclament comme nécessaire, au nom de la prospérité générale.
TH. BENTZON.