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1870, pendant la guerre du Brésil contre le Paraguay, éclata à l’Assomption sur le Parana, à 300 lieues de la côte : propagée jusqu’à Buenos-Ayres, elle y fit plus de trente mille victimes.

L’Europe, à son tour, a reçu à maintes reprises la visite du redoutable fléau. Les pays méridionaux, au-dessous du 43e degré de latitude, ont été particulièrement éprouvés. — L’Espagne fut atteinte pour la première fois, à Cadix, en 1700. Le même port fut infecté de 1730 à 1734, puis en 1780, de nouveau de 1800 à 1804, et de 1810 à 1812. L’épidémie de 1800-1804, au lieu de rester confinée le long de la côte, remonte le cours du Guadalquivir et gagne l’intérieur des terres : elle s’étend à l’Andalousie et s’abat sur la Catalogne ; elle fait 80 000 victimes. En 1821, c’est Barcelone qui est infectée par le navire Grand-Turc venant de la Havane ; 20 000 personnes périssent. Nouvelle épidémie à Pasages, en 1828. A partir de ce moment il n’y a plus à signaler que deux incursions du fléau relativement bénignes : l’une à Barcelone en 1870 ; l’autre à Madrid, en 1878, à la suite du retour d’un régiment cubain. — Le Portugal a été sérieusement atteint, en 1723, à Lisbonne : il l’a été légèrement en 1750 et 1751. Une épidémie grave s’est déclarée à Oporto en 1856 : elle était importée par deux navires arrivant du Brésil : elle tua 7 000 personnes. — L’Italie ayant peu de relations maritimes avec les foyers de contamination est restée à peu près indemne. Cependant, en 1804, lors de l’épidémie d’Espagne, la contagion s’étendit de Barcelone à Livourne et 1 500 personnes périrent. En 1883, un malade s’étant rendu à Torre Annunziata devint le centre d’une petite infection amarile qui se répandit autour de cette localité.

Voilà pour les pays chauds d’Europe.

Dans la partie plus tempérée, au nord du 43e parallèle, en France, en Angleterre, on a observé fréquemment des cas de fièvre jaune importés par navires, mais jamais d’épidémie véritable.

En France, les lazarets de Marseille et de Brest ont reçu des malades atteints de typhus amaril, en 1802, 1804, 1807, 1821, 1836, 1839, et plus tard, presque tous les ans, de 1891 à 1900. A chaque fois les ouvriers employés au déchargement des bateaux ont été atteints : mais il n’y a pas eu de contagion à terre, en dehors des navires.

Les faits de Marseille en 1821 et de Saint-Nazaire en 1861 sont particulièrement intéressans : MM. Chantemesse et Borel ont montré à quel point ils étaient instructifs. Pendant l’été de 1821, alors que l’Espagne était violemment atteinte, un brick, le Nicolino, quitta le port de Malaga pour se rendre à Marseille. Le jour même de son départ, le 26 août, un malade mourait à bord : c’était un cas de fièvre