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d’accord ! Mais il y faut autre chose qu’un changement de dénomination.

Nous avons vu plus haut comment un ministre belge se vantait d’avoir pour les vagabonds substitué à la prison la maison de travail. Il ne parlait là, remarquons-le d’abord, que de gens sans domicile et sans ressources. Mais pour peu que l’assisté refuse de se laisser fixer et de travailler, le juge belge le met bel et bien pour sept ans, à la disposition du gouvernement qui le détient dans une de ces maisons où il l’oblige à faire sa tâche quotidienne. En quoi cela diffère-t-il de la répression et de cette forme de la répression qu’on appelle l’emprisonnement ? Suivons maintenant ces internés ou ces détenus (de ces deux mots finalement l’un vaut l’autre, et on appellerait ces gens des reclus, que le bénéfice serait aussi nul). La parité de leurs antécédens et surtout leur agglomération créent avec eux un milieu dont nul artifice ne modifiera la nature. Les Allemands ont cru faire une belle découverte en appelant « travail forcé, » au singulier, le régime de leurs « stations » réservées aux mendians et aux vagabonds. Il a bien fallu, pour y maintenir la discipline, des sévérités comparables à celles des bagnes : elles ont entraîné des morts qu’il a fallu défendre à grand’peine, soit devant les tribunaux, soit à la tribune. De là cette déclaration (je ne puis faire autrement que de la rappeler ici) d’un ministre prussien dans une séance du Reichstag : « Toutes personnes connaissant bien les maisons de travail forcé admettront certainement que la population de ces établissemens est pire que celle des maisons centrales et que les réclusionnaires sont des personnages distingués si on les compare aux internés. »

Tels sont les hommes en faveur de qui la répression devrait, semble-t-il, reculer chaque jour d’un pas de plus devant l’assistance. Je ne crois pas nécessaire d’insister.


VII

« Où est donc, diront cependant quelques hommes aux illusions tenaces, où est donc l’utilité d’insister sur ces aspects si tristes ? Et quelle est donc cette âpreté que vous mettez à dépister partout les retours offensifs du crime ? Quel est donc cet amour de la répression et cette crainte de voir la société montrer trop de