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ni mines, ni quelque privilège que ce soit. Sous l’impression de ces menaces, la American-China-Development-Company serait, dit-on, sur le point de renoncer à sa concession de la ligne Canton-Han-keou moyennant une indemnité de 35 millions de francs. Des capitalistes français demandent, depuis plusieurs mois, à Pékin la concession d’une ligne reliant le moyen Yang-tse au Se-tchouen ; les Japonais établis dans cette province font campagne pour empêcher l’octroi de la concession, ils font valoir que les Chinois peuvent exécuter ce chemin de fer par leurs propres moyens en s’adressant à des ingénieurs nippons. Le journal le Chen-pao a raconté, en décembre 1904, que les étudians chinois de Tokio venaient d’écrire une longue lettre à leurs compatriotes du Se-tchouen pour les engager à ne plus recourir aux étrangers pour la construction de leurs voies ferrées. Voici un extrait de cette lettre :


Jadis pour ruiner un État, on supprimait rois et ministres ; à présent on emploie de nouveaux procédés ; on met la main sur l’autorité et les finances.

Hélas ! les étrangers qui ont employé ces moyens ont pu détruire des États ! A présent ils sont à la tête des chemins de fer de toute la Chine ; seule notre province n’est pas entre leurs mains (suit l’énumération des lignes concédées aux étrangers).

L’été dernier, les consuls de France et d’Angleterre ont tenté d’obtenir la concession d’une ligne au Se-tchouen ; c’est pourquoi nous prions tous nos concitoyens de cette province de la construire eux-mêmes au plus tôt. Autrement les étrangers pourraient s’emparer de cette voie et nuire à nos intérêts dans la province.


La campagne de boycottage qui se poursuit actuellement contre les produits américains, pour obtenir que les États-Unis renoncent aux lois prohibitives de l’émigration jaune, est encore plus caractéristique ; elle a été organisée dans tous les ports sous la direction du parti réformiste, et c’est aux Japonais qu’elle profitera ; en vain le ministre de l’Union a obtenu du gouvernement impérial une lettre prescrivant aux vice-rois de mettre fin à cet ostracisme des marchandises américaines, le mouvement d’opinion est plus fort que les prescriptions officielles et rien ne l’arrêtera avant qu’il ait obtenu satisfaction. « D’un seul cœur, boycottons les marchandises américaines : » tel était l’avis affiché à la fin de juillet à Canton. Une campagne aussi violente a stupéfié les Américains ; mais n’est-ce pas de leur étonnement même qu’il est permis de s’étonner ? Il est trop commode d’applaudir