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même en présence d’une artillerie bien servie, quand on a l’imprudence d’y accumuler tous les organes de commande du bâtiment et d’y réunir presque tout le personnel chargé de la direction ?… Pour rappeler l’intérêt de la stabilité de plate-forme en vue de la précision du tir et les avantages des quilles latérales pour atténuer l’amplitude des mouvemens de roulis ?… Pour noter que la protection des « œuvres vives, » contre les effets des torpilles, est un problème qui n’a pas encore reçu de solution satisfaisante — autre que celle de la mobilité, de la vitesse du bâtiment, solution approchée seulement ?… Pour constater enfin que les cuirassés dont la stabilité après avaries n’a pas été l’objet d’une étude approfondie chavirent comme de simples barques et coulent à pic, ainsi que l’avait prédit notre éminent constructeur, M. Bertin, soit que le projectile les ait atteints, grâce au roulis, au-dessous de la cuirasse de flottaison, soit, et mieux encore, que la brèche, faite un peu au-dessus de la flottaison et du pont cuirassé, laisse s’introduire à chaque oscillation du bâtiment un poids d’eau considérable dans l’entrepont ?… Mais, outre que ces questions ne sont pas nouvelles, nous ne saurions nous laisser entraîner ici à une discussion d’un technisme trop accusé. On peut être assuré d’ailleurs que les études depuis longtemps poursuivies chez nous sur ces importans sujets recevront de l’examen attentif des résultats matériels du combat de Tsoushima une impulsion décisive et que nos grandes unités de l’avenir bénéficieront de tous les perfectionnemens compatibles avec les caractères généraux du type qui aura été définitivement adopté.


Telle est donc cette bataille de Tsoushima, qui a si vivement frappé les imaginations, qui a eu et qui méritait d’avoir un si grand retentissement. Nous ne nous flattons pas d’avoir pu, dans une étude dont nous ne dissimulions pas au lecteur, en l’entreprenant, le caractère provisoire, tirer de cet événement maritime tous les enseignemens qu’il comporte. Il est du reste un point que nous avons laissé volontairement dans l’ombre, un sujet sur lequel il nous eût été pénible d’insister, surtout au moment où se produisait la rébellion du Kniaz-Potemkine : c’est l’état moral dans lequel se trouvait, a-t-on dit, une partie de l’escadre de la Baltique. Nous voulons espérer qu’il y a eu beaucoup d’exagération dans les relations qui ont été faites de certains