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agens de l’acidité. L’un de ces procédés est particulièrement avantageux en ce qu’il ne modifie aucunement la solution à l’étude, il n’y introduit aucune substance étrangère, il n’y ajoute aucun réactif ; c’est un procédé purement physique. Il consiste à organiser une. pile de concentration à électrodes gazeuses, formées par une l’âme d’hydrogène. La solution à étudier forme l’un des élémens de cette pile. L’opération se résume à en mesurer la force électromotrice Une formule théorique due à Nernst permet de déduire de cette mesure la concentration de la solution en ions H, c’est-à-dire la valeur cherchée.

La supériorité de la méthode électrométrique sur la méthode titrimétrique est éclatante. Elle offre d’abord l’avantage d’indiquer l’acidité actuelle de la solution, sa teneur présente en ions hydrogène libres. La méthode titrimétrique, en la supposant irréprochable, un ferait encore connaître que l’acidité potentielle, c’est-à-dire celle qui correspond à la totalité de l’acide, sans distinguer la partie ionisée (véritable facteur de l’acidité) de la partie d’acide qui ne l’est pas. Elle donne le titre de la solution qui aurait subi une complète dissociation. Or cet état de dissociation n’est pas l’état réel de la solution ; il n’y est pas réalisé hic et nunc. Supposons qu’il s’agisse d’un acide moyen ou faible comme l’acide acétique, dont les molécules dissociées (ions H et acétyle) représentent au plus 10 pour 100 des molécules complètes d’acide acétique. La neutralisation par la soude se continuera jusqu’à ce que la quantité d’alcali ajoutée soit égale à la quantité totale d’acide acétique, dissocié et non dissocié, existant dans la solution : et ce n’est pourtant que la partie dissociée en ions H qui agit efficacement comme acide.

Ce n’est pas tout ce que l’on peut reprocher à la méthode titrimétrique. Une expérience très simple montre, en effet, que l’acidité d’un acide faible est diminuée par l’addition d’un sel neutre de cet acide. Par exemple, que l’on mette 10 gouttes d’acide acétique dans 100 centimètres cubes d’eau, le tournesol y prendra une teinte rouge révélatrice de l’acidité : que l’on verse ensuite une solution d’acétate de soude absolument neutre au tournesol : on croit peut-être que ce liquide absolument neutre ne va rien changer à la condition de la solution. C’est une erreur. Le tournesol vire aussitôt du rouge au violet, signalant ainsi un abaissement de l’acidité par introduction d’un corps neutre. La théorie des ions fournit une explication de ce fait qui reste paradoxal pour la chimie classique. On risque donc de modifier l’acidité d’une liqueur par l’opération titrimétrique elle-même