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d’Amalfi, de Gaëte, de Terracine, à la fin du XIIIe siècle, montrent la même direction dans la marche de l’importation sarrasine. Cette influence s’étendra dans l’architecture civile, jusqu’aux palais et villas (palais Ruffolo, à Ravello, 1271-1288 ; Casa Venerio, à Sorrente), dont les façades splendides fleurissent à cette extrémité de la péninsule comme de joyeuses notes de rappel des autres palais italo-arabes qui s’élèvent à Venise. Dans l’Apulie, plus éloignée, le mouvement par l’influence municipale garde ses caractères locaux. La grande église bénédictine et normande, Saint-Nicolas de Bari, est devenue le type inspirateur. On s’efforce alentour de faire plus grand encore, mais de faire à peu près semblable. Bitonto, en l’imitant avec quelques innovations, fournit un modèle à Bisceglie, Giovinazzo, Acquaviva délie Fonti, etc. Les cathédrales d’Altamura et de Matera tiennent la tête dans ce concours de rivalités bâtisseuses.

La même ardeur pour les constructions anime toutes les villes du royaume. Dans la Terre d’Otrante, c’est l’abbatiale de Nardo. En Capitanate, où l’absence de bonnes pierres, dans les terrains d’alluvions, exige une technique particulière et une plus longue fidélité aux coupoles grandes ou petites, uniques ou multipliées, ce sont : à Siponto, la cathédrale et San Leonardo, à Monte Sant’Angelo, à Trani, à Molfetta, à Foggia, à Termoli, à Troja, à Bénévent, de nouvelles églises qui s’élèvent, et d’anciennes qui se modernisent ou se complètent. La sculpture monumentale n’est point en reste. Dans les tympans et les voussures, sur les colonnes et les chapiteaux, sur les portails, ambons, chaires, tabernacles, clôtures, candélabres, à l’extérieur, à l’intérieur, partout les tores et les bandes se chargent de marqueteries géométriques chatoyantes et variées, de végétations feuillues et florales, stylisées ou naturelles, qui se déroulent, s’accompagnent, s’entre-croisent avec une abondance, une aisance, une largeur admirables. Les animaux exotiques et les figures humaines, isolées ou groupées, y refont leur apparition et commencent à s’y mêler avec moins de timidité. On doit prévoir l’heure prochaine où les sujets religieux s’y développeront librement comme ils font déjà dans la peinture. On peut suivre ce développement à Trani, Barletta, Ruvo, Siponto, Monte San’ Angelo, etc. La plupart de ces essais conservent le souvenir de l’influence byzantine opiniâtrement exercée par les miniatures, orfèvreries, tissus, ivoires d’importation ou d’imitation.