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être résolues que par des lois identiques votées par les Parlemens des deux pays. Il proteste avec plus de vigueur encore contre les atteintes portées à sa prérogative. Il a parfaitement raison en principe et tous les juristes seront de son avis ; mais il n’y a ni lois, ni constitution qui tiennent devant une révolution. Quelquefois on peut arrêter celle-ci, la retarder ou la détourner par des concessions opportunes ; seulement il faut le faire à l’heure propice, et cette heure est sans doute passée. Alors, il ne reste que… la dernière raison des rois, et nous nous demandons si le roi Oscar voudra l’employer. Il perdrait un trône pour son fils sans être sûr de le conserver pour lui-même, car on n’arrête pas le cours naturel des choses qui, depuis de longues années déjà, semble pousser la Suède et la Norvège vers une séparation inévitable. Nous avons dit qu’on éprouvait en Suède un découragement assez voisin de la résignation : l’épreuve montrera si cela est vrai.

Depuis quelques jours, une lueur de paix, encore assez faible, apparaît à l’horizon de l’Extrême-Orient : c’est à M. le président Roosevelt que l’on doit cette initiative, et cette résolution lui fera, quoi qu’il advienne, le plus grand honneur. Il ne l’a pas prise sans s’être assuré au préalable que les deux gouvernemens russe et japonais étaient disposés à l’accueillir. A peine est-il besoin de dire que les gouvernemens de toutes les nations civilisées lui donneront, discrètement et dans la mesure de leurs forces, le concours le plus dévoué. Assez de sang a coulé ! L’honneur de la Russie est sauf et ses intérêts historiques ne sont nullement compromis. Il dépend de la modération du Japon de rendre la paix possible : l’humanité lui saura gré de le faire.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-Gérant,

F. BRUNETIERE.