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dangers près des routes ou dans les limites du louvoyage. Il fit même des levés, comme ceux de l’anse de la Torche, près de Penmarc’h et de la baie d’Aiguillon près de La Rochelle, qui devaient servir uniquement aux navires affalés par la tempête pour leur permettre de faire côte avec plus de sécurité.

L’œuvre de Beautemps-Beaupré fut si appréciée des marins, que toutes les autres nations adoptèrent ses méthodes et se mirent en mesure de procéder à leur tour au levé de leurs côtes. En même temps les ingénieurs hydrographes furent appelés à coopérer aux grands voyages de recherches et d’explorations qui signalèrent la renaissance de notre marine, de 1830 à 1840. Vincendon-Dumoulin, de Tessan, Givry, se signalèrent dans les expéditions scientifiques des Dumont d’Urville, des Dupetit-Thouars, comme leur chef l’avait fait au début de sa carrière dans le voyage de d’Entrecasteaux. Dès que nos armes furent portées sur le sol africain, Bérard et Lieussou procédèrent à une reconnaissance rapide des côtes de notre nouvelle conquête. Enfin, quand le levé des côtes de France eut été terminé en 1845, le zèle de nos hydrographes se porta sur les pays voisins. Toute la côte Ouest d’Italie fut levée de 1846 à 1858, entre notre frontière et le détroit de Messine, par des ingénieurs français dont l’œuvre, admirablement interprétée par des artistes de premier ordre, s’est traduite par des chefs-d’œuvre de gravure que les nouveaux travaux effectués par les Italiens n’ont pas supplantés.

Les expéditions coloniales appelèrent nos hydrographes sur de nouveaux terrains. De même que] les ingénieurs géographes accompagnèrent nos armées du Premier Empire à travers les contrées les plus diverses de l’Europe où ils se signalèrent par de remarquables travaux, de même les ingénieurs hydrographes firent partie de toutes les expéditions maritimes de la seconde moitié du siècle dernier. Les flottes de la Crimée, du Petchili, des mers de Chine, celle de l’amiral Charner comme celle de l’amiral Courbet, virent nos hydrographes à l’œuvre. Ils pilotèrent nos navires dans les passes du Peï-Ho, du Donnai, de la rivière Min, et accompagnèrent Garnier dans sa conquête du Tonkin. Dans toutes ces expéditions, le temps qui n’était pas consacré aux opérations militaires était employé aux levés hydrographiques. C’est ainsi que furent reconnus de 1859 à 1887 l’estuaire du Mékong et du Donnai, la côte d’Annam, le delta du