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nous nous dispenserons de nommer les autres. Ils avaient préparé un amendement à l’article 4, qui a été étouffé sous le double poids de M. Briand et de M. Ribot, et ils ne s’en sont pas consolés. Ils ont annoncé, dès le premier moment, qu’ils trouveraient dans la discussion de l’article ti un champ mieux approprié à leurs manœuvres et qu’ils y reconquerraient de haute lutte tout ce qui avait été concédé en trop à l’Église catholique et à ses défenseurs. Mais comment faire ? On risquait de retrouver en face de soi M. Briand et M. Ribot : il fallait, à tout prix, mettre quelque chose entre eux. Quoi ? La délégation des gauches ! Personne ne songeait plus à cette institution vieillie. La délégation des gauches a été l’expression parlementaire du Bloc. Elle se composait des délégués des quatre groupes de la majorité : lorsqu’ils avaient parlé, la majorité n’avait plus qu’à opiner du bonnet. C’était assurément une grande simplification du gouvernement parlementaire, mais c’en était aussi la destruction. On apportait à la Chambre un travail tout fait, et elle n’avait plus qu’à enregistrer les solutions qu’on paraissait lui soumettre, mais auxquelles, en réalité, on la soumettait. C’est ainsi que M. Combes a gouverné pendant deux ans et demi ; son éloquence suffisait à cette méthode de gouvernement ; mais il semblait que la délégation des gauches ne devait pas survivre à l’homme qui avait si bien su s’en servir. On la croyait morte. Qui se serait douté qu’elle devait ressuscitera l’évocation de M. Georges Leygues, qui lui avait été autrefois si funeste ? Non pas nous, certes ! Mais M. Leygues avait la modestie de croire qu’il ne pouvait rien à lui tout seul, et il venait en effet d’en faire l’expérience. La commission ayant repoussé ses anciens amendemens, il a eu l’idée, naturelle peut-être mais peu glorieuse, de lui faire imposer les nouveaux par la délégation des gauches : il lui a donc demandé pour eux l’estampille officielle, et il a eu l’insigne honneur de l’obtenir de la main même de M. Pelletan. M. Pelletan, sorti des ruines de notre marine qu’il a accumulées, s’était réfugié dans les ruines de la délégation des gauches, évidemment plus faciles à relever. S’attendait-il à y recevoir, pour première visite, celle de M. Leygues ? Non, sans doute. Comment ces deux adversaires de la veille se sont-ils réconciliés, nous n’en savons rien. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ont signé un amendement commun à l’article <>. Ils ont dit ensuite très fièrement à la Chambre : Nous sommes la délégation des gauches, vous savez donc ce que vous avez à faire, inclinez-vous ! Mais les choses ne se sont pas passées tout à fait ainsi.

C’est qu’il manque aujourd’hui à la délégation des gauches un des