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d’aujourd’hui doivent transmettre aux associations cultuelles de demain, et c’est sur cette dévolution qu’a porté jusqu’ici le débat. On n’a pas oublié que M. Ribot a obtenu de la Chambre, avec le concours de M. Briand et de M. Jaurès, qu’elle votât une nouvelle rédaction de l’article 4, en vertu de laquelle il reste entendu que la dévolution sera faite par la fabrique à une association constituée conformément à l’organisation générale du culte à l’exercice duquel elle doit pourvoir. Qu’est-ce à dire ? On s’en est expliqué avec beaucoup de franchise. L’organisation du culte catholique, — car c’est à lui qu’on a songé tout le temps, — est connue. Tout y repose sur le respect d’une hiérarchie qui, depuis le dernier desservant de nos villages jusqu’au pape, en passant par les évêques, assure l’unité de l’Église au moyen d’une subordination consentie par tous. C’est là le principe de l’Église catholique : on ne saurait le violer, sans porter atteinte à l’Église elle-même, et M. Briand, aussi bien que M. Jaurès, se sont défendus avec éloquence de toute arrière-pensée de ce genre. Mais ces arrière-pensées, d’autres les ont à leur place. On leur a su très mauvais gré, dans le parti radical, de l’appui qu’ils ont donné à M. Ribot. Une polémique extrêmement chaude a été dirigée contre eux pendant les vacances parlementaires. Elle a été surtout l’œuvre de M. Clemenceau, dont la verve impitoyable, épargnant M. Briand, s’est déchaînée contre M. Jaurès, et aussi de M. Pelletan qui, tombé du ministère, a repris sa plume et toutes ses vieilles habitudes de journaliste. M. Pelletan s’est vanté dans un journal de fermer la bouche à M. Jaurès, chose difficile. Toutefois, à la reprise des travaux de la Chambre, M. Jaurès a montré un esprit plus hésitant et un caractère qui a paru troublé.

Pourquoi ? Nous en avons dit un motif ; il y en a encore un autre. Quelques hommes politiques, qui cherchent leur fortune entre les partis de gauche et le centre sans l’y avoir encore trouvée, étaient mécontens du rôle qu’ils avaient, ou plutôt qu’ils n’avaient pas joué dans la discussion de l’article 4. Ce sont des hommes dont personne ne doit désespérer. Tout le monde peut les avoir avec soi à un moment donné, mais il ne faut pas avoir la prétention de les fixer : ils ne donnent pas, ils se prêtent, et, lorsqu’ils n’ont pas atteint leur but dans une campagne faite avec ceux-ci, ils en font une autre avec ceux-là. Le ministère Combes ayant duré trop longtemps à leur gré, ils se sont séparés de lui, et nous avons alors applaudi leur courage, car ils nous rendaient service. On les a appelés les « dissidens. » L’homme le plus en vue de ce petit groupe est M. Georges Leygues :