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propriétaire de vignes, à ce remarquable effort de nos agriculteurs, les a fait connaître à l’Académie des Sciences, dans la séance du 6 février dernier. Il a résumé les enseignemens de cette campagne en disant que les orages, les gros orages, avaient été nombreux pendant l’année 1904, dans cette partie de la France ; qu’ils y avaient causé de grands dégâts autour de la région défendue ; mais que toujours celle-ci avait été préservée, sinon à ses limites, au moins dans sa partie centrale.

Depuis trois ans, le mouvement de défense s’est étendu à beaucoup d’autres régions. Dans la Côte-d’Or, il s’est formé, à partir de l’année 1902, 23 sociétés grêlifuges réunies en un Syndicat présidé par M. Savot. Ce groupe a pu mettre en batterie 180 canons et 140 pots à fusée. — Des organisations semblables se sont établies dans le département de la Loire et dans celui de la Gironde.


II

Les expériences s’étant ainsi multipliées, on commence, — mais on commence seulement, — à posséder les documens précis qui permettront d’apprécier les effets produits par le bombardement des nuées orageuses et de juger de l’efficacité ou de l’inanité de ce moyen de défense.

C’est qu’en effet le procès est encore pendant. La méthode de tir a ses détracteurs comme elle a ses partisans enthousiastes. Ces derniers, sans se laisser émouvoir, vont de l’avant ; ils organisent la propagande, créent des expositions d’engins perfectionnés comme celle qui eut lieu à Nuits-Saint-Georges en janvier 1904 ; ils appellent la discussion et convoquent des congrès internationaux où se discutent toutes les questions théoriques et pratiques qui se rattachent à la défense contre la grêle.

La contradiction, pourtant, ne fait pas défaut. Les opposans insistent sur la disproportion des forces en présence : d’un côté l’irrésistible puissance des agens naturels, du vent, de l’eau, de l’éclair qui est une étincelle électrique de plusieurs kilomètres de longueur : de l’autre côté, une artillerie clairsemée et débile, qui est à peine capable d’envoyer à quelques centaines de mètres une couronne de fumée sans masse et sans force. On demande comment l’ébranlement produit par le tromblon agricole pourrait atteindre les nuées électrisées, qui couvrent le ciel à une grande hauteur ; en supposant qu’il les atteigne, quel pourrait être l’effet de ce souffle expirant sur les masses