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lui manquait encore ; un peintre distingué vaudois, M. Jeun Morax[1], pour les costumes et les décors ; un musicien vaudois, et cette fois, il fallut choisir, car deux noms se présentaient, ceux de MM. Gustave Doret et Jacques-Dalcroze. Ce dernier venait de remporter, avec son Festival, un éclatant succès : ce fut une raison pour le Comité d’offrir à M. G. Doret l’occasion de déployer à son tour son beau talent dans le maniement de grandes masses musicales. Il n’y a plus que le maître du ballet, M. d’Allessandri, qui soit un objet d’exportation.

Le budget des dépenses s’est élevé à 350 000 francs. Quand j’aurai dit que sur cette somme considérable, 10 000 francs seulement sont réservés à la publicité par la voie des journaux, j’aurai démontré par un fait véritablement extraordinaire que la fête conservera certainement quelque chose de son caractère primitif : l’ignorance d’une des forces les plus dangereuses à manier de notre époque, d’une de celles qui, utiles parfois, servent trop souvent à fausser la vérité, en substituant, dans l’appréciation des œuvres d’art comme dans le lancement des affaires, l’intérêt à la sincérité, le calcul à l’indépendance. Ce trait original ne sera pas le seul reste des traditions anciennes : une fois de plus Vevey nous donnera ce spectacle, — qu’on ne rencontre à ma connaissance nulle part ailleurs, — d’une population qui trouve en elle-même la poésie nécessaire à représenter sa propre vie, et les moyens artistiques appropriés à l’exprimer, sans imitation des formes consacrées ni des autres spectacles.


EDOUARD ROD.

  1. M. René Morax a donné plusieurs pièces : la Nuit des Quatre-Temps, — la Bûche de Noël, — Claude de Siviriez, qui témoignent d’un très remarquable talent dramatique et ont été accueillies avec beaucoup de faveur dans le public français.