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au goût du jour, pour lancer des appels aux amis de la Vigne. On ne lira peut-être pas sans un certain intérêt celui qui porte la date du 5 janvier 1793[1] :

« Dans tous les temps, dans tous les lieux, et chez toutes les nations, on a encouragé l’agriculture. Cette terre, notre mère nourricière, demande des bras, des êtres intelligens, qui lui aident, pour ainsi dire, à faire éclore ses productions avec abondance.

« Les potentats, le régime féodal, les despotes, les aristocrates, les démocrates, et les philosophes, ont constamment révéré l’agriculture ; entre autres celui de ces derniers qui a été le plus célèbre de nos jours, a rendu hommage à cette classe de citoyens, si utile à la société en général, et communément peu favorisée des biens de la fortune. J’estime donc que la Société, autrefois désignée sous la qualification de Confrérie des Vignerons, et vulgairement appelée aujourd’hui Société de l’Agriculture, ne pouvoit rien faire de mieux que d’inviter le public (comme elle l’a fait dès 1791 par son imprimé) à contribuer volontairement à ce salutaire établissement.

« J’espère aussi que ceux qui ont bien voulu par leur souscription en former le premier capital auront lieu, ainsi que leur postérité, de se féliciter de plus en plus d’y avoir donné naissance.

« Il n’y a, autant que j’ai pu le calculer et le prévoir, qu’un seul abus à redouter, ce seroit de la partialité dans la distribution des primes : chaque membre qui sera appelé à y donner son suffrage devra considérer qu’il rendroit nul cet établissement bienfaisant, et le couvriroit d’opprobre, s’il s’écartoit des principes, que l’honneur et la bonne foi l’appellent d’apporter dans ses suffrages ; dans tous les cas, mais particulièrement lorsqu’il s’agira de cette opération. »

Quand la fête fut de nouveau proposée, en 1797, le gouvernement bernois, à la veille de sa chute, se croyait moins menacé : parce que les régimes, comme les individus, sont aveuglés par les dieux hostiles, quand leur heure a sonné. Aussi ne fait-il aucune objection aux projets de la Confrérie, qui d’ailleurs ne songe qu’à « se réjouir des flatteuses promesses de la Paix[2]. » Les préparatifs habituels se poursuivent tranquillement, sans qu’on remarque quelques traits qui pourraient alarmer : un jour,

  1. Manual, à cette date.
  2. Manuaux, 11 juin 1797.