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rencontrait encore au commencement du siècle passé. Sa férocité n’empêchait point les Egyptiens de le momifier en très grandes quantités, mais on ne sait encore dans quelle intention. Ses dépouilles remplissent d’immenses galeries, quelquefois des grottes naturelles comme à Mâabdé près de Monfalout, où une caverne, qui s’enfonce profondément dans la montagne, en renferme probablement des centaines de mille mêlés à des momies humaines. A côté de ces grands et gros animaux, on trouve d’innombrables paquets en forme de fuseaux, maintenus par des tiges de papyrus, renfermant vingt-cinq petits crocodiles collés ensemble par le bitume ; quelquefois ils sont placés sur de petites corbeilles tissées en écorces contenant des œufs du saurien et dans l’intérieur desquels on trouve encore les embryons bien conservés. Ces animaux, malgré leur haute antiquité, ne montrent aucune différence avec ceux qui vivent actuellement au milieu des rapides de la seconde cataracte ainsi que dans les régions supérieures des deux Nils. Le régime et la température des eaux n’ayant probablement jamais changé depuis des milliers d’années, le type du crocodile est resté absolument le même.

Les momies de singes sont presque toujours des momies de cynocéphale ou d’une petite espèce de cercopithèque. Le premier était consacré au dieu Thot, l’écrivain des paroles divines, et aussi le dieu des écrivains, toujours présent à la scène du jugement dernier au moment où l’on pèse dans les balances divines les bonnes et les mauvaises actions de l’âme du défunt. Thot était représenté le plus souvent sous la forme d’un singe cynocéphale, mais quelquefois aussi sous celle d’un singe cercopithèque à longue queue. Quoique les Égyptiens paraissent avoir élevé fréquemment des singes soit chez des particuliers, soit dans les enceintes sacrées, les momies en sont cependant très rares ; elles étaient souvent conservées dans des cavités creusées dans le dos de gros singes sculptés en pierre ou en granit et toujours assis dans une attitude contemplative comme ceux que l’on peut encore voir au Musée du Caire. Nous avons reçu récemment une momie de singe contenue dans un sarcophage en bois représentant un cynocéphale assis. La radiographie nous a bien montré qu’elle renfermait un singe, mais un singe privé de crâne et de cou. Nous avons alors, sur la partie antérieure de la momie, coupé avec soin les nombreuses bandelettes résineuses, fortement collées, formant une paroi protectrice très épaisse. Quelle