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Les Ritualistes les plus ardens n’étaient pas ceux qui dépensaient le moins de zèle à empocher les conversions. Quand, sur la paroisse de S. Alban, tout un couvent de religieuses ritualistes était, à la suite de son chapelain, passé au catholicisme, c’était Mackonochie qui avait entrepris de retenir et de raffermir les compagnes désorientées et désolées des défectionnaires, et qui avait fait venir plusieurs d’entre elles de province, pour fonder un nouveau couvent dans le même quartier. Ces religieuses, ainsi dirigées par lui, défendues contre la tentation d’imiter ce qu’il leur présentait comme une désertion coupable, reprenaient l’œuvre désorganisée et la menaient à bien, en dépit des suspicions qui les enveloppaient et des difficultés de toutes sortes auxquelles elles se heurtaient[1]. Mackonochie, en effet, si catholique, si romain qu’il parût être par ses doctrines, par les formes de sa piété, si mécontent qu’il fût des chefs de son Eglise, n’avait cependant jamais eu l’ombre d’un doute sur la situation de cette Eglise et sur la fidélité qui lui était due. L’idée d’une sécession lui faisait horreur. Cet état d’esprit était celui de beaucoup d’autres Ritualistes « avancés. » L’un de leurs premiers champions, le Rev. Bennett, avait publié des Lectures on the distinctive errors of Romanism. Les sentimens contradictoires qui éloignaient ces hommes du catholicisme, tout en les attirant vers ses dévotions, aboutissaient parfois à des bizarreries qui eussent été impossibles en un pays où la logique aurait eu plus d’empire. Le même clergyman qui, sur le sol anglais, se faisait un cas de conscience de ne pas mettre le pied dans une église catholique romaine, parce que là les catholiques lui paraissaient des intrus, papal schismatics in England, ou comme on disait encore, « la mission italienne en Angleterre, » jugeait louable, une fois sur le continent, de fréquenter les églises de ces catholiques qu’il considérait, sur ce terrain, comme les héritiers légitimes de la tradition apostolique ; et on le voyait se hâter, aussitôt les vacances arrivées, de traverser la Manche, pour goûter, en sécurité de conscience, les pieuses jouissances qu’il ne trouvait que dans la participation aux offices et aux dévotions catholiques[2]. On ne semblait pas supposer qu’il pût y avoir là quelque inconséquence.

  1. Memories of a Sister of S. Saviour’s Priory, p. 94, 98 à 109. A. H. Mackonochie, A Memoir, p. 132 à 136.
  2. City of Peace, p. 16 et 25.