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que l’idée en a fait des progrès sensibles, et que ces progrès tiennent en partie aux dernières discussions et aux derniers votes de la Chambre.

La séparation est, dès aujourd’hui, acceptée par trois catégories de personnes. La première est celle des résignés qui, en principe, n’en sont pas partisans et qui rassurent leur conscience en y mettant certaines conditions : si ces conditions n’étaient pas admises, ils sortiraient, disent-ils, de leur résignation et deviendraient des opposans. Quelques-uns le feraient sans doute. La seconde, catégorie est composée des radicaux sectaires et jacobins, qui veulent séparer l’Église de l’État pour la détruire, et qui ont introduit sournoisement dans la loi toutes sortes de pièges où ils espèrent bien la voir tomber et périr. La troisième catégorie comprend des hommes plus intelligens et plus politiques, adversaires de l’Église, sans doute, et n’ayant rien de commun avec elle, ennemis même de toute religion, mais qui, plus sincères, plus consciens dans leur désir de séparation, entendent n’avoir le lendemain aucun rapport avec l’Eglise, pas plus pour la persécuter que pour la soutenir. Après avoir rompu avec elle, ils se soucient médiocrement de ce qu’elle deviendra. Leur conviction est qu’elle cessera peu à peu, et peut-être même assez vite, de trouver l’air respirable autour d’elle et qu’elle mourra dès lors de dépérissement : mais c’est son affaire et non pas la leur. Cette troisième catégorie est composée de socialistes. Tous les socialistes n’en font pas partie ; il y en a qui se rapprochent beaucoup des radicaux et se confondent même avec eux ; mais d’autres et des plus qualifiés, comme M. Jaurès et M. Briand, déclarent très haut que, libres penseurs véritables, ils respectent la croyance des catholiques, des protestans et des israélites, comme ils demandent qu’on respecte leurs propres convictions. Que veulent-ils, en somme ? Enlever aux Églises l’espèce de garantie du gouvernement que leur donne le Concordat. Cela fait, ils sont contens et ne demandent pas davantage. Avons-nous besoin de dire que, partisans du Concordat, nous ne sommes d’accord ni avec les uns, ni avec les autres ; mais que, si le Concordat doit périr, nous sommes, en qualité de libéraux, beaucoup plus près des socialistes de la troisième catégorie que des jacobins de la seconde. Entre eux et nous, il peut y avoir des ententes partielles et provisoires.

C’est ce qui est arrivé au cours de la discussion de l’article 4, relatif à ce qu’on a appelé la dévolution des biens. Il existe en ce moment une somme plus ou moins considérable de biens mobiliers ou immobiliers qui, sous des dénominations différentes, appartiennent aux