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Church Association ne se contentait pas d’un succès partagé et elle en appela au Conseil privé. Celui-ci justifia la confiance qu’on lui témoignait. Son jugement du 23 décembre 1868 donna, sur tous les points, tort à Mackonochie et le condamna à tous les dépens, même à ceux de première instance. Wilberforce lui-même, bien que peu sympathique au Ritualisme extrême, ne pouvait s’empêcher de constater l’évidente « partialité » de ce jugement qui semblait « fait, disait-il, pour plaire au Times. » A l’en croire, les membres laïques de la Cour avaient été également partagés, et c’était l’archevêque d’York, adjoint à la Cour pour cette cause ecclésiastique, qui avait fait la majorité dans le sens restrictif[1].

Dès le 19 janvier 1869, le vicar de S. Alban reçut un monitoire dont la seule rédaction suffisait à montrer ce qu’avait de choquant et de ridicule l’intervention, en semblable matière, d’une haute cour politique. Dans cette pièce, c’était la reine Victoria elle-même qui, s’adressant nommément au Rev. Mackonochie, lui faisait commandement exprès de s’abstenir, dans l’avenir, d’élever le calice et la patène, d’encenser, de mêler l’eau et le vin, de s’agenouiller durant la consécration et d’user de cierges allumés. « Et à cela ne manquez pas, » disait en finissant le monitoire. Faut-il s’étonner que l’English Church Union trouvât là matière à protestation, qu’elle déniât l’autorité d’une Cour qui n’avait rien d’ecclésiastique et rappelât l’urgente nécessité de la réforme, déjà plusieurs fois réclamée dans ces derniers temps, de la juridiction suprême en matière religieuse[2].

Ces plaintes n’étaient pas pour arrêter la Church Association qui, toujours sous le nom de M. Martin, poursuivit de nouveau Mackonochie, en décembre 1868, pour n’avoir pas obéi au monitoire. Vainement celui-ci se défendit-il en exposant que, durant la consécration, il n’élevait pas les élémens au-dessus de sa tête, seule pratique défendue, et se contentait de l’élévation moindre permise par la Cour des Arches, vainement ajoutait-il qu’il ne s’agenouillait pas, ne se prosternait pas, mais seulement fléchissait le genou, le Conseil privé ne parut pas embarrassé d’avoir à mesurer ces gestes liturgiques ; il voulut bien reconnaître que l’accusé n’avait pas élevé les élémens trop haut, mais il estima qu’il s’était agenouillé trop bas, et, suivant son habitude, il le condamna à tous les dépens.

  1. Life of Wilberforce, t. III, p. 294.
  2. Bayfield, History of the E. C. U., p. 109-110.