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extérieures, régulièrement espacées à l’entour : les « alandiers » ou foyers, bourrés de houille, qui portent la température à 1 500 degrés dans la salle du rez-de-chaussée, à 1 000 dans la salle supérieure : le « dôme » ou « globe. » C’est ici que séjourne la pâte crue, avant remaillage. Sa première cuisson, sans être trop « tendre, » ne doit pas être poussée au blanc ; elle y perdrait toute porosité et ne pourrait absorber l’enduit liquide dans lequel on la plongera.

Le chef-enfourneur a donc une lourde responsabilité. Une fournée manquée, en la supposant de valeur moyenne, ce serait 12 ou 15 000 francs de perdus, et il suffirait pour cela d’un moment d’inattention. Cependant, jusqu’à une date récente, il n’exista, pour diriger la marche du four, que des moyens empiriques : des « témoins » ou « montres, » morceaux de porcelaine que l’on retirait de temps en temps. L’appareil de Wedgwood, fondé sur la puissance de contraction que subit l’argile aux températures de plus en plus élevées, avait fini par tomber dans l’oubli. C’est seulement il y a quinze ans que fut inventé par M. Le Chatelier, professeur au Collège de France, suivant la théorie proposée naguère par Becquerel, un pyromètre capable de mesurer les forces électromotrices de deux soudures semblables opposées l’une à l’autre. Cet instrument, dont la précision est due à de savantes recherches sur la nature des métaux qu’il convient de mettre en contact, permet aux industriels d’apprécier la chaleur exacte de leurs fours jusqu’à 1 800 degrés.

Il est aussi très important, pour être guidé dans le réglage des feux, de connaître à chaque moment l’intensité du tirage, dont dépend la combustion plus ou moins parfaite du charbon. Un appareil très simple, créé dans ces dernières années d’après le principe du manomètre de Kretz, est si sensible qu’on se rend compte avec lui d’une dépression de 1 centième de millimètre. Pour mener à bien une cuisson, il faut en outre être renseigné sur la nature des gaz qui circulent dans le four : grâce à la découverte de l’appareil Orsat, la composition chimique de ces gaz, qui exigeait précédemment une analyse de laboratoire, est déterminée en quelques minutes dans la salle même des fours.

Or ici la « qualité, » si l’on peut dire, de la flamme a tout autant d’importance que l’intensité de la chaleur. Suivant le combustible employé et suivant qu’il circule plus ou moins d’air dans le four, la flamme peut être « oxydante » ou « réductrice. »