il a été reçu par les autorités anglaises et espagnoles. Il était passé à Tanger comme un météore : l’incident était terminé.
Nous parlons de l’incident matériel ; l’incident politique est plus grave ; il ne fait peut-être que commencer et le monde entier en est occupé. On se demande ce que veut exactement l’empereur Guillaume. Sa démarche a causé une surprise qui est encore loin d’être dissipée. Sans doute il a habitué l’Europe à des manifestations inopinées et soudaines ; mais il n’avait encore rien fait, dans ce genre, d’aussi violemment caractérisé que son voyage à Tanger. Personne ne s’attendait à cet éclat, et comment aurait-on pu s’y attendre ? Si nous laissons de côté, — sauf à y revenir plus tard, — l’accusation adressée par la presse allemande à notre diplomatie d’avoir oublié l’Allemagne dans le règlement de la question marocaine, nous nous trouvons seulement en présence des allégations du chancelier de l’Empire devant le Reichstag. Fidèle, il faut le reconnaître, aux préoccupations qu’il avait manifestées dès le début, c’est-à-dire il y a un an, M. le comte de Bülow n’a entretenu le Reichstag que des intérêts commerciaux de son pays. C’est la sauvegarde de ces intérêts que l’Empereur et que son gouvernement veulent s’assurer. Rien de plus naturel, ni de plus légitime ; mais en quoi ces intérêts sont-ils plus menacés aujourd’hui qu’il y a six mois ou un an ? Or, il y a six mois et un an, on ne les considérait nullement comme menacés à Berlin. Nous en avons pour preuves les déclarations de M. le comte de Bülow lui-même, les articles des journaux qui sont les confidens habituels de sa pensée, enfin le ton des conversations diplomatiques qui ont eu lieu à Berlin et à Paris. Ces conversations ont été rares, il est vrai ; mais nous ne les avons jamais fuies, et il dépendait du gouvernement allemand de les rendre aussi fréquentes et aussi explicites qu’il l’aurait voulu. Nous nous serions certainement prêtés à tous ses désirs. Loin d’en exprimer aucun, il nous a entretenus, et on peut dire qu’il a entretenu l’Europe dans l’impression qu’il n’avait rien à demander de plus que ce qu’on lui avait dit, et qu’il en avait été pleinement satisfait. Les journaux allemands se plaignent aujourd’hui qu’on n’ait pas fait à leur gouvernement une notification officielle de l’accord franco-anglais. Il aurait été sans doute plus correct de la faire, et non pas seulement au gouvernement allemand, mais à tous les autres. C’est pousser toutefois bien loin le respect, ou plutôt la superstition des formes diplomatiques que d’avoir paru ignorer pendant toute une année un accord que tout le monde connaissait, si on avait à ce sujet quelque explication à demander. Nous vivons dans une atmosphère de publicité où