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JULIE DE LESPINASSE

II[1]
LE COUVENT DE SAINT-JOSEPH


I

La maison des Filles de Saint-Joseph de la Providence occupait le spacieux emplacement que couvrent actuellement les divers bâti mens des services de la Guerre. A gauche de l’hôtel de Brienne, consacré de nos jours à l’habitation du ministre, était un corps de logis séparé, desservi par une petite cour, où l’on avait accès par la rue Saint-Dominique. Dans cette partie de la maison, indépendante de celle où se cloîtraient les religieuses, quelques appartemens, d’une discrète élégance, étaient loués à des femmes du monde, veuves, demoiselles, ou séparées de leurs maris. Elles y vivaient librement, sans contrôle, servies par des gens à leurs gages, n’étant nullement astreintes aux règles du couvent, tout en bénéficiant du parfum de décence qui émanait de ce pieux voisinage. La marquise du Deffand habitait l’appartement même où s’était réfugiée, après sa retraite de la Cour, la protectrice de la maison, Mme de Montespan, dont l’écusson ornait encore la plaque de fonte de la grande cheminée. L’installation, sans être vaste, était confortable et charmante : « J’ai un très joli logement, fort commode, » écrit-elle à Voltaire. Les documens du temps donnent un aperçu du salon, d’un luxe

  1. Voyez la Revue du 1er avril.